Obligement - L'Amiga au maximum

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Dossier : Histoire de l'Amiga - année 2000
(Article écrit par David Brunet - septembre 2013, mis à jour en septembre 2021)


2000 : Amiga Inc. prépare une nouvelle voie

L'année mythique 2000, qui augurait la modernité durant le XXe siècle, fut l'année des nouveaux commencements pour l'Amiga. Malgré les nombreuses annonces et changements de cap des six années précédentes, le marché Amiga était resté figé. Le nouvel Amiga Inc. avait peut-être quelque chose pour changer cela.

Quatrième rachat de l'Amiga

Depuis la rentrée 1999, l'Amiga était à l'agonie. Mais cela n'empêcha pas son nouveau rachat, cette fois par Amino, une toute jeune société composée d'anciens employés Amiga de Gateway comme Bill McEwen et Fleecy Moss. Les dirigeants de Gateway ne semblaient pas mécontents de la vente de sa gênante filiale qui lui posa finalement beaucoup de soucis (l'Amiga NG virtuel de Gateway/Amiga Inc. fut classé deuxième aux humiliants "vaporwares 1999" du site Wired.com). Amino avait été soutenu financièrement, pour le rachat de la marque (nom, licences, inventaire, AmigaOS - mais aucun employé), par la société new-yorkaise Invisible Hand (une des firmes d'investissement du magnat Pentti Kouri) et par Net Ventures BV (gérée par Ruud Veltenaar) aux Pays-Bas. Ce rachat fut estimé à cinq millions de dollars.

William McEwen Pentti Kouri
Bill McEwen et Pentti Kouri

Le 3 janvier 2000, Bill McEwen, en tant que CEO, fit sa première annonce, modifiant le nom de la société "Amino Development" en "Amiga Inc.". Elle fut suivie quatre jours plus tard au salon CES par une autre annonce : Amiga Inc. avait choisi la société anglaise Tao Group, gérée par Francis Charig, en tant que partenaire pour son nouveau système d'exploitation. Celui-ci était basé sur le système Intent/Elate de Tao Group, il prit le nom de "Amie" (AMIga Elate) dans un premier temps, puis renommé en "AmigaDE" (Amiga Digital Environment) à partir de septembre. Tao Group était spécialisé dans les systèmes logiciels indépendants du matériel.

Francis Charig
Francis Charig (photo d'Amiga-News.de)

Amiga Inc. précisa ses intentions deux semaines après, en indiquant son souhait de se concentrer sur deux domaines : le marché de la convergence (nommé "Pathfinder", pour les créateurs, les joueurs, les artistes) et l'équipement numérique domestique ("Domestic Digital Habitat"). Un ordinateur de bureau, l'Amiga NG, serait également vendu sur le marché. Tous ces produits numériques devaient être réunis sous le terme d'Aqua, mais ce nom fut abandonné car Apple l'utilisait pour une partie de son système d'exploitation.

Pour de nombreux observateurs, la vitesse à laquelle la nouvelle entité Amiga faisait ses annonces était un changement surprenant. Pour exemple, cela avait pris pas moins d'un an à Gateway/Amiga Inc. pour faire la même annonce de partenariat pour le système. Mais il fallait rappeler que Bill McEwen et Fleecy Moss avaient été virés d'Amiga Inc. par Gateway pour "divergences de vues" avec leurs supérieurs à propos de la stratégie de développement du nouvel Amiga. Leur rachat de l'Amiga était probablement la continuation de leur vision de l'époque Gateway. En fait, Amino travaillait déjà avec Tao depuis plusieurs mois.

Construction d'une équipe et d'un projet

Durant le mois de février, Amiga Inc. annonça son déménagement vers le Snoqualmie Ridge Business Park (dans l'état de Washington, aux États-Unis) et le recrutement de plusieurs développeurs ou personnes connues du monde Amiga. Par exemple, Andreas Kleinert (l'auteur des AK Datatypes), Wouter Van Oortmerssen (l'auteur du langage Amiga E), Gary Peake (membre du groupe Team Amiga) et Dean K. Brown (concepteur de cartes accélératrices pour Amiga) furent embauchés pour développer le système Intent/Elate de Tao Group dans un environnement d'exploitation grand public. Randall Hughes (qui aida au rachat de l'Amiga) fut nommé vice-président et directeur des ventes, alors que Vincent Pfeifer fut nommé vice-président des opérations. Les embauches se poursuivirent en juillet avec Paul Nolan (auteur du logiciel de retouche graphique Photogenics qui devint responsable de l'interface graphique du nouveau système), Bolton Peck et Robert Cosby (contrôle-qualité pour le matériel).

Wouter Van Oortmerssen Paul Nolan Gary Peake
Wouter Van Oortmerssen, Paul Nolan et Gary Peake

Bureaux d'Amiga Inc.
Les bureaux d'Amiga Inc. à Snoqualmie

La société avait, en parallèle, initié trois réseaux pour communiquer avec la communauté Amiga : un réseau de distributeurs Amiga (Amiga Dealer's Network), un pour le soutien aux développeurs Amiga (Amiga Developer Support Network) et un conseil d'information Amiga (Amiga Advisory Council). Ce dernier réunissait des développeurs Amiga, des journalistes, des groupes d'utilisateurs et des revendeurs. Il fut créé sous l'ère Gateway et Amiga Inc. le réactiva dans le but d'asseoir sa position sur le marché, fournissant ainsi un point de renseignement pour les utilisateurs Amiga.

Le salon du Gateway Amiga Show, du 1er avril 2000, fut l'occasion pour Amiga Inc. de montrer pour la première fois au public son nouveau système, Amie. La société voulait rompre avec l'héritage matériel de l'Amiga, en produisant un système d'exploitation qui gérerait toute une gamme de périphériques, du téléphone portable au serveur, en passant par les ordinateurs et les assistants numériques personnels. Le concept, similaire au Java de Sun Microsystems, permettait aux logiciels écrits pour lui d'être exécutés sur des processeurs et systèmes différents sans la nécessité d'être recompilés. Bill McEwen fit d'autres présentations au World Of Alternative (juin) ou à l'AmiWest 2000 (juillet) où l'on pouvait voir toute la puissance du nouveau système : Amie pouvait par exemple être cloné. Avec cette possibilité, une nouvelle fenêtre de l'environnement était ouverte dans laquelle toutes les mêmes applications continuaient à tourner indépendamment des premières ! Cette fonction pouvait être relancée à souhait pour tripler ou quadrupler l'environnement, seules les limites mémoire et processeur pouvaient la freiner.

Intent/Elate
Le système Amie/Elate montré lors du salon Gateway Amiga Show

Développement d'Amie/AmigaDE

Comme Amiga Inc. avait aussi promis de soutenir le marché existant, la société annonça des partenariats avec un certain nombre de développeurs Amiga et fit référence à certains constructeurs matériels. Ainsi, Haage & Partner, Epic Interactive, Titan Computer, Met@box et Hyperion devaient concevoir des produits de transition qui devaient permettre à l'utilisateur de migrer vers la nouvelle plate-forme. Des sociétés hors-Amiga comme Red Hat, Corel, Sun Microsystems et Ruksun Software Technologies étaient également mentionnées afin de soutenir l'effort d'Amiga Inc. à produire un environnement numérique, mais la nature exacte de ces relations resta floue. Tout ce bruit autour de la stratégie d'Amiga Inc. eut un écho dans les médias non-Amiga voire non-informatique comme la chaîne de télévision CNN qui invita Bill McEwen dans son émission Digital Jam le 30 juin 2000.

La première partie du projet Amie/AmigaDE d'Amiga Inc. consista en une trousse de développement logiciel (SDK). Sa sortie le 3 juin symbolisa la fin des annonces non respectées très caractéristiques de l'histoire récente de l'Amiga. Ce fut un tournant qui devait potentiellement attirer des développeurs et des utilisateurs sur le long terme. Bien qu'incomplet, bogué et contenant un contrat de licence peu clair, le SDK Amiga fournissait aux développeurs l'opportunité de produire des logiciels pour la nouvelle plate-forme et pour un prix demandé bien plus bas que les autres sociétés (par exemple Sony). Ses ventes furent relativement bonnes avec quelque 20 000 unités écoulées dans les trois premiers mois. Red Hat, une importante société du monde Linux, vendit même le SDK Amiga à partir d'août, tout comme Amazon. Ce SDK fut pour Linux mais une version native Windows fut commercialisée en octobre et Haage & Partner devait s'occuper de la version PowerPC (qui ne vit jamais le jour).

Amiga SDK

Amiga SDK
Le SDK d'Amiga

Amiga Inc. dévoila aussi la machine de développement Amiga, nommée "d'Amiga Development Workstation" (qui fut un simple PC x86 AMD standard), elle devait être vendue par un certain nombre de distributeurs Amiga. Il était originellement prévu qu'Amiga Inc. ne fournirait le SDK qu'avec les kits-développeur approuvés Amiga, mais cette règle fut changée quelques jours plus tard. Étant donné que la machine de développement était un PC standard, le fournisseur ou l'utilisateur final était capable de la configurer, en accord avec les spécifications, selon ses besoins. Cela résulta en un certain nombre de variantes de la machine, comme le proposa Eyetech avec ses plates-formes de développement EZDev.

EZDev
Les machines de développements proposées par Eyetech

L'arrivée de la trousse de développement et des stations de développement suscitèrent le scepticisme dans la communauté. Il n'y avait rien d'Amiga là-dedans comme l'indiqua Mike Battilana, le président de Cloanto : "Le matériel n'est pas Amiga et le logiciel n'est pas Amiga", "C'est utiliser le nom Amiga pour attirer les développeurs et les utilisateurs".

Des annonces sur des partenariats matériels suivirent (Infomedia Network le 16 août et MeterNet le 20 septembre) afin de produire des boîtiers décodeurs avec le système Amie/AmigaDE. Une autre annonce laissait présager un partenariat entre Amiga Inc. et le constructeur de puces graphiques Matrox. Amiga Inc. avait fait une excellente affaire grâce à ce partenariat pour ses objectifs à court terme car, selon l'annonce, il avait accès aux projets présents et à venir de la technologie Matrox. Mais ces annonces n'aboutirent sur rien de concret.

Pour protéger ses droits, Amiga Inc. annonça début juin que les personnes et sociétés intéressées par l'utilisation du nom "Amiga" devaient décrocher préalablement une licence. Un nombre considérable de projets amateurs, que ce soit pour les logiciels ou les sites Web, utilisaient le nom "Amiga" sans autorisation. Ce bénévolat était l'une des forces de la scène Amiga et il y eut une levée de bouclier contre ce projet. Amiga Inc. lâcha donc un peu de leste par la suite et indiqua qu'il s'agissait d'un moyen pour lutter contre les sites Web Amiga pirates.

AmigaOne, projet d'un Amiga de nouvelle génération

Les salons World Of Alternative (juin) et Alternative Computer Expo 2000 (octobre) furent ceux de l'annonce de l'arrivée d'un Amiga de nouvelle génération nommé "AmigaOne". Cette première nouvelle machine Amiga grand public depuis 1994 était prévue pour faire tourner l'Amiga Digital Environment (AmigaDE). Amiga Inc. présenta une liste de ses caractéristiques, regroupées sous le nom de code "Zico", mais il n'y avait aucune mention spécifique pour le processeur (en fait, il n'en avait pas besoin car AmigaDE pouvait fonctionner sur n'importe quel processeur). La liste intégrait seulement des caractéristiques comme une carte graphique Matrox de nouvelle génération, des ports USB, FireWire et PCI.

Au moins deux sociétés se montrèrent intéressées : Eyetech pour produire l'AmigaOne 1200/4000 (une carte greffon PowerPC se fixant sur les A1200 et A4000, développée avec l'aide de Martin Schüler d'Escena) et l'allemand bPlan pour construire une carte AmigaOne PowerPC autonome. La carte de bPlan fut par la suite nommée "Pegasos" mais on ne savait plus vraiment si elle serait officialisée en tant qu'AmigaOne ou non. bPlan était une jeune société créée par deux anciens ingénieurs de Phase 5, Gerald Carda et Thomas Knabel. Elle était de ce fait proche de l'équipe MorphOS, elle aussi formée d'anciennes personnes gravitant autour de Phase 5. Des AmigaOne à base de processeur x86 furent également évoqués par Bill McEwen mais personne ne fut intéressé pour en produire.

Alan Redhouse Gerald carda Thomas Knabel
Alan Redhouse (Eyetech), Gerald Carda et Thomas Knabel (bPlan)

Un marché Classic fragile

Malheureusement, le rachat de l'Amiga vint trop tard pour une bonne partie du marché. Par exemple, Phase 5, concepteur matériel de longue date, entra finalement en liquidation le 26 janvier. Ses projets de cartes accélératrices PowerPC G3/G4 et son ordinateur AmiRage K2 ne virent donc jamais le jour. Plus grave, on apprit par ailleurs que Wolf Dietrich, patron de Phase 5, s'était enfuit avec la caisse, notamment l'argent des précommandes des clients ! Triste fin pour l'une des plus grosses sociétés Amiga...

Wolf Dietrich
Wolf Dietrich

Les rédacteurs derrière l'Amiga Web Directory et l'Amiga Yellow Pages annoncèrent également la suppression de leurs services en janvier. Ce fut suivi par l'annonce de l'arrêt de la publication, après douze ans, du magazine Amiga Format (qui publiait, dans ses meilleures années, entre 130 000 et 140 000 exemplaires mensuels). Et durant cette année, divers acteurs du marché Amiga mirent la clé sous la porte comme AsimWare, Alive Mediasoft, Marble Eyes, Atéo Concepts, ainsi que divers revendeurs, développeurs indépendants ou sites Web.

Amiga Format
Le dernier numéro d'Amiga Format

De son côté, Amiga International, gérée par Petro Tyschtschenko, baissa significativement, en mars, le prix des Amiga 1200. Il subsistait un stock assez important de ces machines (20 000 unités) et une baisse nette de prix (à 199 DM) fut le seul moyen de gagner de l'argent pour une entreprise dont l'activité était basée sur des produits en fin de vie.

Amiga International était la filiale européenne d'Amiga Inc. en charge principalement de l'Amiga Classic. Vu la tournure des événements depuis le début de l'année, il était clair que l'importance de cette filiale ne pouvait que décroître. Petro Tyschtschenko ne soutenait pas la vision de Bill McEwen sur le nouvel Amiga. En août, Petro Tyschtschenko créa même une entreprise du nom de Power Service GmbH, qui n'avait rien à voir avec l'Amiga mais qui présageait que quelque chose ne tournait plus rond. Quand Bill McEwen l'apprit, il fut choqué de voir que "Petro n'avait pas l'Amiga en tant que première de ses priorités". En novembre, la communauté Amiga fut informée de la décision d'Amiga Inc. de fermer les bureaux d'Amiga International. Dans une entrevue pour Amiga Topcool, Petro Tyschtschenko précisa ce point avec Amiga Inc. :
"Ici, en Allemagne, j'étais complètement en dehors de la boucle. Je devais traquer les informations via Internet, ce qui n'a bien sûr pas arrangé les choses. J'ai toujours eu ce sentiment agaçant qu'ils voulaient se débarrasser de moi, qu'ils étaient jaloux et envieux de mes relations avec la communauté. J'ai quitté Amiga Inc. de mon propre chef."
On ne sait pas si ce fut une conséquence du conflit entre les deux sociétés Amiga, mais Petro Tyschtschenko vendit tout le stock d'Amiga à une société indienne pour seulement 75 000 dollars, une somme étrangement basse puisque les ventes d'Amiga généraient un revenu d'environ 150 000 euros par mois. Cela affecta évidemment les finances d'Amiga Inc.

La bulle Met@box

Comme le marché de l'Amiga Classic était en perdition depuis plusieurs années, certaines sociétés Amiga attaquèrent d'autres marchés plus porteurs. Ce fut le cas de Met@box, société créée par d'anciens employés Amiga, et anciennement nommée "PIOS Computer". Elle travaillait depuis 1998 sur la conception de boîtiers décodeurs dont le dernier en date, le Met@box 1000. Celui-ci, en développement, était basé sur un processeur ColdFire, partiellement compatible 68k, et le système d'exploitation CaOS (ou MetaRTOS), proche d'AmigaOS, qui intégrait des logiciels Amiga comme MUI ou Voyager.

Met@box 1000

Met@box 1000 Met@box 1000
Le Met@box 1000 et ses applications

Met@box semblait être en pleine réussite économique. Le 6 juillet, on apprit qu'elle avait reçu une grosse commande de 500 000 machines (400 millions de DM) de la part de WorldSat, une entreprise française. L'action de Met@box à la bourse de Francfort, qui ne cessait d'augmenter depuis des mois, fut alors à son paroxysme. Cette société allemande était potentiellement la plus riche, et de loin, du monde Amiga, devançant même Amiga Inc. et tous ses soutiens.

Cette incroyable nouvelle, qui aurait pu déboucher sur du concret pour le marché Amiga, s'arrêta après l'été : les annonces prévoyant la production de millions de boîtiers décodeurs furent exagérées (soupçon de fraude), et le cours de l'action plongea vertigineusement. L'éphémère bulle spéculative de Met@box éclata et, par la même, tous ses rêves les plus fous.

Systèmes d'exploitation : dernière pour AmigaOS 68k, première pour MorphOS

On n'attendait plus trop de choses du côté d'AmigaOS Classic depuis que Bill McEwen avait fait d'AmigaDE sa priorité. Mais à la plus grande surprise de la communauté Amiga, Bill McEwen annonça lors du salon ACE 2000, en octobre, qu'AmigaOS 3.9 serait lancé avant Noël 2000. Personne ne s'attendait à une mise à jour aussi rapide du système. Et étant donné la faible durée qui s'était écoulée depuis la dernière version, peu de choses étaient attendues de ce produit. Cette mise à jour, développée par Haage & Partner (comme pour AmigaOS 3.5), offrait la gestion du PowerPC (via WarpOS), de nouveaux pilotes, des lecteurs multimédias, une fonction de recherche de fichiers, une barre d'icône (pour lancer des programmes ou des scripts) et AHI, le système de standardisation sonore. Par contre, il n'apportait aucune fonctionnalité innovante. En lieu et place, la version 3.9 apparue plutôt comme une mise à jour mineure d'AmigaOS 3.5 avec l'intégration de programmes tiers pour combler quelques lacunes.

AmigaOS 3.9
AmigaOS 3.9

A ce moment-là, Amiga Inc. précisa que cette mouture serait la dernière version d'AmigaOS pour la plate-forme dite "Classic". Pourquoi préférer AmigaDE et ne pas continuer à développer l'actuel système ? La réponse de Bill McEwen au salon ACE 2000 fut simple :
"Cela prendrait six mois pour porter le système actuel sur PowerPC, et encore ce ne serait qu'avec de l'émulation 68k. Un vrai portage prendrait douze à dix-huit mois."
Mais lors de sa session IRC au World Of Amiga 2000, le 9 décembre, Fleecy Moss, le directeur technique d'Amiga Inc., révéla qu'un AmigaOS 4.0 PowerPC pourrait voir le jour si 50 000 exemplaires d'AmigaOS 3.9 étaient vendus. Une pétition organisée par le site Amigart allait d'ailleurs en ce sens : elle demandait à Amiga Inc. d'autoriser le développement de cet AmigaOS 4 pour PowerPC (malgré l'utopie de la barre des 50 000 exemplaires).

Si AmigaOS espérait une version native PowerPC, un autre système d'exploitation, apparenté Amiga, ouvrit la voie : MorphOS. Développé depuis 1998 par des proches de la société allemande Phase 5 (Ralph Schmidt et Frank Mariak), MorphOS était un système d'exploitation PowerPC fortement inspiré d'AmigaOS : arborescence des fichiers/répertoires similaire, concept des bibliothèques partagées, des datatypes, de startup-sequence... Son noyau, Quark, devait beaucoup de ses idées à AmigaOS mais il les implémentait d'une façon propre. Mieux, il proposait en plus des propriétés modernes comme la gestion multiprocesseur, la mémoire virtuelle ou le pistage des ressources.

La première version publique fut diffusée début août 2000, elle fut suivie par la version 0.2 en octobre. Ces premières versions furent utilisées principalement par des développeurs et quelques utilisateurs avertis, le grand public était encore loin d'avoir sauté le pas. MorphOS fonctionnait par-dessus AmigaOS 3.1 (il n'avait pas de bureau) mais n'utilisait que le PowerPC des cartes BlizzardPPC/CyberStormPPC. Cet environnement PowerPC pouvait lancer les applications Amiga 68k via une émulation intégrée.

MorphOS
Une version bêta de MorphOS

L'arrivée d'un système d'exploitation rival d'AmigaOS suscita de la méfiance dans le clan Amiga Inc./Haage & Partner. Il y eut apparemment quelques annonces anti-MorphOS de la part d'Amiga Inc. en début d'année mais le travail sur ce système d'exploitation continua. En l'absence d'un portage officiel d'AmigaOS sur PowerPC, MorphOS devint une alternative intéressante pour continuer le développement des Amiga Classic PowerPC. Par ailleurs, les autres projets de système d'exploitation PowerPC entamés les années passées (comme PowerOS de Claus Herrmann) furent tous arrêtés.

Du côté matériel : le PCI arrive enfin

Par le passé, le marché Amiga avait vu apparaître des cartes bus (le Zorro IV d'Elbox ou l'AtéoBus d'Atéo Concepts en 1999) permettant d'étendre les Amiga avec divers périphériques. En 1996, la firme DKB avait même mis au point la Wildfire, la première carte accélératrice Amiga disposant de ports PCI, mais ceux-ci étaient inactifs. Il fallut donc attendre l'année 2000 pour voir de véritables ports PCI fonctionnels sur l'Amiga de monsieur Tout-Le-Monde. La première carte bus PCI, le Mediator PCI, fut proposée par la société polonaise Elbox ; elle fut annoncée en juin et lancée trois mois plus tard. Ce modèle pour Amiga 1200 disposait de quatre ports PCI à la norme 2.1 (32 bits, 33 MHz) et on rêvait alors aux fantastiques possibilités d'extension qu'offrait le marché PC. Les pilotes pour cartes graphiques S3 Virge et Voodoo apparurent rapidement, d'autres pilotes pour le réseau et le son suivirent. Le potentiel pour améliorer les Amiga existants était énorme. Au lieu des coûteuses cartes Zorro, l'amigaïste pouvait désormais bénéficier des cartes PCI standards peu onéreuses.

Mediator
La carte bus Mediator PCI 1200

La venue du PCI coupa littéralement l'herbe sous le pied des quelques constructeurs encore présents de cartes propriétaires Amiga (graphique, son, réseau). Ce potentiel marché aiguisa l'appétit de deux autres sociétés, DCE et Eyetech, qui annoncèrent elles aussi leur projet de cartes PCI : le G-Rex et le Predator. Il parut vite évident que la coexistence de plusieurs produits concurrents dans un marché si petit causerait des problèmes. Les trois sociétés tentèrent de saboter les autres solutions pour promouvoir leur produit, résultant en une situation équivalente à la guerre des noyaux PowerPC de 1997 (PowerUP contre WarpUP). Ce conflit concernait particulièrement le pilote graphique Voodoo dont tous voulait s'accaparer la licence CyberGraphX.

Elbox ne s'arrêta pas en si bon chemin et annonça, en octobre, la SharkPPC, une carte accélératrice à base de PowerPC G3/G4 et de mémoire SDRAM qui devait venir se fixer sur un Mediator PCI. Prévue pour février 2001, cette carte ne fut jamais commercialisée et elle grossit les rangs des cartes PowerPC qui ne se furent jamais matérialisées (Twister PPC, Brainstormer, Amijoe G3...).

Un autre projet d'envergure, le BoXeR, allait connaître une nouvelle année vide, bien que les annonces de son constructeur auguraient le meilleur. Ce projet de nouvel Amiga Classic fut racheté par Anti Gravity en mars et cette entreprise embaucha Mick Tinker (son concepteur) pour qu'il puisse continuer le développement. De plus, l'arrivée de fonds et d'ingénieurs supplémentaires (notamment Joe Torre) présageait une accélération du développement et une sortie possible en 2001. Cette équipe annonça même le début du développement d'un Amiga Classic portable.

Anti Gravity

A la suite de la liquidation de Phase 5, DCE repris à sa charge la production et la commercialisation des BVision, CyberVisionPPC, CyberStormPPC et BlizzardPPC. En l'absence de réelles nouveautés sur le marché Amiga, ces cartes de feu-Phase 5 étaient encore très demandées. Les constructeurs de matériel Amiga, de moins en moins nombreux, étaient confrontés aux coûts de fabrication inhérents aux petites quantités. On vit alors se multiplier de simples "adaptateurs" permettant d'utiliser du matériel standard. Outre le Mediator pour les cartes PCI, des adaptateurs de souris PS/2 (Mr Mysza de chez Merlancia, Mroocheck d'Elbox) ou des adaptateurs pour manette (le PSXPort de Blittersoft, un adaptateur de manette PlayStation) arrivèrent sur le marché.

Logithèque : Internet dope un marché logiciel moribond

MorphOS et AmigaOS 3.9 étaient sortis cette année et un troisième système d'exploitation était toujours en cours de développement : AROS. Aaron Digulla (initiateur d'AROS) et Steve Crietzman (administrateur d'Open Amiga Foundation, anciennement COSA) voulaient doper le développement de ce clone portable d'AmigaOS. Une annonce datée du 16 février 2000 indiqua que les deux organisations allaient fusionner dans le but de créer un AmigaOS à code source ouvert. En mai, c'est Aaron Digulla qui rendit publique une tentative audacieuse : professionnaliser/payer l'équipe de développement d'AROS et l'intégrer dans Sowatec AG, la société dans laquelle il travaillait. Ces deux projets, qui auraient permis d'épauler efficacement AROS, n'eurent aucune suite. Le développement d'AROS continua donc à un rythme modeste ; la seule étape importante franchie cette année fut celle de la possibilité pour AROS de s'auto-amorcer (donc de s'utiliser sans environnement virtuel).

Le secteur logiciel concernant Internet était sans doute celui qui progressa le plus en 2000. De nouvelles versions des navigateurs AWeb 3.4, IBrowse 2.2 et Voyager 3.3, de la pile TCP/IP Miami Deluxe et du gestionnaire de courriers électroniques YAM 2.2 arrivèrent. L'auteur de ce dernier, Marcel Beck, arrêta son activité et publia le code source de son logiciel : il ne fallut pas longtemps à la communauté pour reprendre le développement de ce logiciel omniprésent chez les amigaïstes et voir une première version native MorphOS. Un autre gestionnaire de courriers électroniques fut publié cette année en la personne de SimpleMail. Ce concurrent de YAM, créé par Sebastian Bauer et Hynek Schlawack était présenté dans une version alpha mais avec les fonctions les plus importantes déjà implémentées.

AWeb 3.4
AWeb 3.4

Ce qui frappa le plus au niveau des logiciels Internet fut leur grande diversification. Ainsi, virent le jour des programmes comme AmigAIM (client de messagerie AOL), SMSEngineer et TaskiSMS (gestionnaires de SMS), Amster (client Napster permettant l'échange de fichiers MP3), StreAmi (lecteurs de flux SHOUTcasts/Icecasts), Samba (portage du protocole SMB), etc. Internet était devenu le secteur le plus porteur de l'Amiga et même de l'informatique entière.

Du côté de l'émulation, quelques programmes plus ou moins expérimentaux pointèrent le bout de leur nez. Profitant de la puissance des processeurs PowerPC, Mathias Roslund porta SOPE, un émulateur PlayStation. Ses résultats modérés et sa compatibilité faible poussèrent ce programmeur suédois à porter, quelques mois plus tard, un autre émulateur PlayStation, FPSE, qui donna des résultats un peu meilleurs mais toujours éloignées de la vraie console. L'émulation Amiga sur PC franchit, cette année encore, une étape importante : l'émulation via UAE dépassa pour la première fois les performances d'un 68060 à 50 MHz grâce aux processeurs Intel x86 qui atteignaient dorénavant la barre symbolique du GHz. Mieux, un procédé d'exécution appelé "Just In Time Compilation" (JIT) fut mis en place sur UAE par Bernd Meyer en août : bien que peu stable, la vitesse de cet émulateur s'accéléra encore, dépassant nettement n'importe quel Amiga Classic 68k.

Mathias Roslund
Mathias Roslund

Dans les autres domaines logiciels, peu de nouveautés apparurent, faute à la lente mais sûre descente du marché Amiga. On avait plutôt affaire à de simples mises à jour comme ProStation Audio 4.0 d'AudioLabs (édition audio semi-professionnelle) ou ArtEffect 4.0 (retouche graphique) et Amiga Writer 2.0 (traitement de texte) de Haage & Partner. Les lecteurs multimédias profitaient pleinement de la puissance du PowerPC (et de la multiplication des nouveaux formats vidéo) pour s'améliorer avec Frogger de Miloslaw Smyk, SoftCinema de Jacek Cybularczyk et AMP de Mathias Roslund : la plupart des formats vidéo à la mode étaient maintenant visionnables sur Amiga ! Enfin, le passage à l'an 2000 provoqua un léger frémissement logiciel pour certains programmes incompatibles avec ce cap temporel : en effet, de nouvelles versions "compatibles an 2000" de Lha, Lzx ou Protracker furent publiées... mais d'autres programmes, plus anciens, ne connurent pas ces mises à jour salvatrices.

ProStation Audio 4
ProStation Audio 4

ArtEffect 4
ArtEffect 4

Bien que le marché ludique Amiga ne produisait, en une année, que la moitié de ce qui sortait en un mois au début des années 1990 (une vingtaine de titres commercialisés et une centaine de DP) les jeux étaient d'une qualité notable. Pour la première fois, la majorité des annonces de jeux était ciblée pour le PowerPC. Les bonnes ventes de WipEout 2097 (le premier jeu commercial PowerPC/Warp3D) avaient encouragé les développeurs à foncer en réalisant d'autres titres utilisant ce processeur. Ainsi, plusieurs portages de Quake, dont le code source avait été ouvert, apparurent, suivis par le jeu d'aventure Nightlong (de Trecision, porté par ClickBoom ; ce dernier fut d'ailleurs vendu à un prix record de... 700 FF !). Mais la société qui s'impliqua le plus dans le jeu PowerPC fut Hyperion. Ben Hermans la créa, avec son ami d'enfance Evert Carton, car il s'était rendu compte qu'il y avait des matériels PowerPC sur Amiga mais pas de jeux. Son premier produit fut le portage du jeu d'action 3D Heretic 2 de Raven Software.

Nightlong
Nightlong

Heretic 2
Heretic 2

Quelques titres originaux furent également lancés sur le marché, tous natifs 68k : le jeu d'arcade/réflexion Bubble Heroes (d'Arcadia Developments), le jeu d'action/aventure Code Name: Hell Squad (de Digital Dreams Entertainment) ou encore Exodus The Last War (de Zloty Skarabeusz/Sland Media), un bon jeu de stratégie temps réel mais qui ne parvint pas à détrôner l'excellent Napalm sortit un an plus tôt.

Exodus The Last War
Exodus The Last War

L'Amiga n'était plus une machine de jeux depuis plusieurs années et les revenus tirés de ce marché ludique étaient bien modestes. De plus en plus d'anciens éditeurs de jeux Amiga Classic autorisèrent d'ailleurs des sites de téléchargement à proposer légalement leurs oeuvres. Alive Mediasoft, société anglaise, s'était notamment engouffré dans la brèche de la republication d'anciens jeux Amiga (Ultimate Xtreme Racing, Goal! 2000) mais ces ventes se faisaient sans l'accord de leurs auteurs, donc totalement illégalement. D'autres activités frauduleuses d'Alive Mediasoft furent découvertes par la suite : l'Amiga avait encore ses vilains petits moutons noirs ! Ce n'était heureusement pas le cas d'Epic Interactive qui n'hésita pas à payer la licence du jeu d'aventure Simon The Sorcerer 2 de chez Adventure Soft et de payer un bon programmeur (Paul Burkey) pour sa conversion. La version Amiga de ce jeu avait été annulée en 1995 pour cause de déclin de la plate-forme. On avait donc ici une petite revanche.

Simon The Sorcerer 2
Simon The Sorcerer 2

Le début d'une scission ?

A l'issue de l'année 2000, Amiga Inc. avait ainsi réalisé un vrai travail de fond. Plusieurs machines-développeur avaient été lancées, AmigaDE était en développement et les machines pour les clients étaient annoncées. Les efforts combinés de Bill McEwen, Fleecy Moss et Randy Hugues surpassèrent les efforts du précédent propriétaire de la marque en apportant réellement un produit sur le marché. Les pions d'Amiga Inc. étaient placés et l'année qui s'annonçait devait voir la confirmation de cette nouvelle stratégie pour l'Amiga.

Mais en coulisse, le manque d'argent se faisait vivement sentir. Les investisseurs, qui avaient aidé Amino/Amiga Inc. à racheter l'Amiga, avaient promis un chèque de 5 millions de dollars supplémentaires pour juin 2000. Mais cette manne n'arriva jamais faute probablement à l'effondrement du NASDAQ, la bourse pour les nouvelles technologies, et de l'éclatement de la "bulle Internet". Ceci mit en difficulté tous les projets d'Amiga Inc. C'est ainsi que Bill McEwen prévoyait, lors du salon ACE de Melbourne en octobre, de mettre en vente un million d'actions Amiga Inc. (10% de la société) pour les membres de la communauté Amiga au prix réduit de 5 $. Cette folle idée, qui ne fut pas réalisée, montra dans quelle urgence financière était tombée la société en fin d'année.

De son côté, le marché de l'Amiga Classic, qui avait perdu son plus important magazine et son plus prolifique constructeur de ces dix dernières années, semblait être dans sa phase terminale. Il continua à couler jusqu'à atteindre des proportions minuscules, surtout qu'il avait été décidé qu'AmigaOS lui-même n'aurait plus officiellement de mises à jour. La communauté Amiga était, dans son ensemble, relativement réticente aux nouvelles idées d'Amiga Inc. L'apparition des solutions PCI et de MorphOS faisait partie des rares motifs d'espérance pour l'avenir.


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