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Dossier : L'histoire de Light Shock Software
(Article écrit par Damiano Gerli et extrait de Genesis Temple - novembre 2021)


Note : traduction par David Brunet.

Dans les années 1990, les éditeurs italiens de logiciels connurent des difficultés : de Simulmondo à Trecision, tout le monde faisait de son mieux pour rester à flot et Light Shock Software ne fit pas exception. Le marché italien, malgré les bons chiffres de vente globaux, était toujours petit, offrant peu de fonds et de visibilité à ceux qui s'essayaient au développement de jeux. De plus, même après 1993, le piratage était toujours un problème. Les studios essayaient désespérément de trouver un public qui ne semblait pas vraiment intéressé à soutenir les équipes locales. Même si la plupart d'entre eux ne virent pas l'an 2000, ils laissèrent derrière eux un héritage important, avec des titres dont beaucoup se souviennent encore dans le monde entier.

Light Shock Software connut une histoire différente de la plupart des autres, puisque les fondateurs Massimiliano Calamai et Francesco Iorio finirent par aborder l'idée d'une maison de logiciels en reprenant les projets d'autres équipes, en agissant à la fois comme développeurs et producteurs, en les supervisant et en les aidant à atteindre un public via des contrats avec des éditeurs internationaux. Light Shock Software ressemblait parfois davantage à un service d'assurance qualité qu'à un véritable développeur, mais ce n'était pas toujours leur intention initiale.

Light Shock Software

À la recherche de talents

Francesco Iorio étudia depuis son adolescence comment développer des jeux vidéo, ses premières tentatives visant à tirer le maximum du matériel de l'Amiga. "Nous avions plusieurs projets intéressants sur lesquels je travaillais avec mon bon ami et camarade de lycée Matteo Tesser, même si aucun n'a jamais été vraiment achevé, ils étaient certainement assez impressionnants pour des programmeurs amateurs", se souvint-il. À l'époque, vers 1993, il mentionna qu'il envoyait régulièrement du contenu au magazine italien The Games Machine qui proposait une rubrique mensuelle, Talent Scout, consacrée aux démos, aux illustrations et, en général, aux idées intéressantes apportées par les lecteurs. C'est par le biais du magazine que Francesco Iorio parvint à entrer en contact avec Fabrizio Farenga, de Holodream Software.

Light Shock Software
En bas à gauche, Holodream Software recherchait des graphistes dans le cadre de la rubrique "Talent Scout" de The Games Machine (1994)

Holodream Software travaillait déjà depuis plusieurs années : ils avaient sorti plusieurs titres pour Genias (Warm Up) de Riccardo Arioti, et avaient récemment signé un accord d'édition avec Team 17 pour F17 Challenge. C'est cet éditeur anglais qui demanda à Holodream Software s'il connaissait quelqu'un de suffisamment compétent pour travailler sur une conversion PC d'Overdrive, car la version originale Amiga s'était bien vendue et ils cherchaient à la sortir sur d'autres plates-formes. Fabrizio Farenga soumit l'idée à Francesco Iorio, qui accepta, travailla dessus pendant un certain temps puis envoya le prototype à Team 17.

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L'éditeur britannique sembla l'apprécier et décida de confier la conversion à Holografix, le nom choisi par Francesco Iorio et Matteo Tesser pour leur équipe de deux personnes. "Mais cela n'a pas duré longtemps, dès que l'éditeur a découvert que la version bêta que nous lui avions envoyée par la suite comportait encore quelques bogues, il a décidé que le projet était trop lent et a changé d'avis. La conversion DOS a fini par être développée par un autre programmeur (NDLR : Kevin Cook, sortie en 1995), même si la nôtre était techniquement supérieure !". Matteo Tesser ajouta : "Je me souviens que Team 17 ne nous a même pas envoyé le code source, nous avons donc dû faire de la rétro-ingénierie à partir de l'Amiga, ce qui a inévitablement entraîné des problèmes au niveau de la mécanique de jeu".

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Overdrive version DOS

Light Shock Software L'équipe d'Holografix m'a donné la permission de distribuer leur version d'Overdrive qui est maintenant disponible sur Web Archive. Cette version a été développée par Francesco Iorio et Matteo Tesser, avec une musique de Giulio Fornasar et des graphismes 256 couleurs améliorés par Raffaele Valensise. Par rapport au jeu Amiga original et à la version DOS ultérieure développée par East Point Software, elle présente les caractéristiques suivantes :
  • Logo haute résolution de Team 17 en 640×400.
  • Des circuits légèrement modifiés avec des publicités "Holodream Tools" le long de la piste.
  • Il y a quatre adversaires différents à l'écran, contre deux sur les versions Amiga et PC.
  • Des graphismes pour l'interface légèrement différents.
  • La bande-son est complètement différente, utilisant le format MIDI au lieu du format MOD.
La version d'Holografix d'Overdrive fut conçue pour fonctionner à 60 images par seconde sur un 386SX en VGA, tandis que la version d'East Point Software nécessitait un ordinateur légèrement plus puissant pour fonctionner à une vitesse acceptable.

Une rencontre entre la Toscane et la Vénétie

Cette possibilité intéressante de travailler avec Team 17 s'étant envolée en fumée, ce fut à nouveau par le biais de The Games Machine que Francesco Iorio entra en contact avec Massimiliano Calamai. C'était en 1993, Massimiliano Calamai travaillait à Simulmondo depuis quelques années en tant que graphiste, mais il en avait assez de travailler sur les mêmes titres de bandes dessinées interactives. Il était plus que prêt à faire autre chose. Massimiliano Calamai avait déjà été en contact avec d'autres jeunes développeurs en devenir, notamment Marco Biondi.

L'équipe de quatre personnes nouvellement formée, Matteo Tesser, Marco Biondi, Francesco Iorio et Massimiliano Calamai, semblait avoir tout de suite sympathisé : Matteo Tesser se remémora qu'ils passaient les week-ends les uns chez les autres, séjournant alternativement à Florence ou à Belluno. Après avoir travaillé pendant quelques mois, Massimiliano Calamai et Francesco Iorio décidèrent de s'envoler pour le salon ECTS de Londres afin de présenter à divers éditeurs un portefeuille de projets : des images et des démos sur lesquelles ils avaient travaillé. Ils rentrèrent en Italie avec de grands espoirs pour leur travail, à tel point qu'en octobre de la même année, ils décidèrent de créer officiellement Light Shock Software. Marco Biondi se souvint : "légalement, seuls Massimiliano et Francesco faisaient partie de la société, puisque Matteo et moi ne pouvions pas le faire. Mais malgré tout, les relations entre nous étaient toujours au même niveau, il n'y avait pas de véritable organisation hiérarchique."

Light Shock Software
European Consumer Trading Show de Londres (ECTS - avril 1993)

Après l'expérience de l'ECTS, The Games Machine donna à nouveau un coup de pouce à la jeune entreprise Light Shock Software : après avoir publié une entrevue de l'équipe, on pouvait à présent placer Light Shock Software sur la carte. Marco Biondi se souvint que "le téléphone sonnait toute la journée, on nous envoyait toutes sortes de choses par courrier". Francesco Iorio et Massimiliano Calamai avaient déjà des plans pour développer leurs jeux et leurs projets mais, comme cela pouvait arriver, ils décidèrent de donner la priorité aux titres d'autres équipes qui semblaient prometteurs. Comme Francesco Iorio avait déjà fait l'expérience de la difficulté pour une équipe inexpérimentée de sortir un jeu, malgré un accord avec un éditeur étranger, il convint avec les autres qu'ils devaient commencer à travailler sur quelques-uns de ces projets prometteurs d'autres équipes italiennes. C'est ainsi que Light Shock Software commença à travailler d'une manière qui ressemblait à une équipe d'assurance qualité.

Ils décidèrent de se répartir entre Belluno (où vivait Francesco Iorio) et Prato (où vivait Missimilaino Calamai), les autres (futures) trois équipes différentes travaillant dans leurs villes respectives. En hommage aux équipes "Amusement Machine" de Sega (AM1, AM2, etc.), les groupes travaillant sur les différents titres furent appelés "Production Studios" (PS1, PS2 et PS3), PS1 désignant l'équipe de Missimiliano Calamai et Francesco Iorio.

Hors d'oeuvre : Black Viper de Digital Exterminators

Dans une entrevue pour la revue Amiga CD32 Player en juin 1995, Francesco Iorio se vantait que l'équipe était naturellement la meilleure du pays dans son domaine : "Nous pensons que bientôt le marché du PC découvrira le jeu d'arcade [...]. J'ai vu certains titres à l'ECTS avec des graphismes exceptionnels mais la seule chose à faire était de déplacer le pointeur pour tirer sur les choses [...]. Quant à un style italien, eh bien je suppose que nous croyons pouvoir faire les choses mieux". Il fit même des références directes à un autre titre de combat italien, Shadow Fighter (conçu par NAPS Team), en disant que leur jeu en cours, Fightin' Spirit, était bien meilleur.

Mais malgré tout, le premier titre que la société reçut et qui l'impressionna fut Black Viper.

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Le titre de Black Viper

Black Viper était un jeu de tir développé par Digital Exterminators (alias D.E.X.). Il s'agissait d'une équipe expérimentée qui avait déjà travaillé sur le jeu Nathan Never, publié par Genias, en 1993. La programmation fut à l'origine assurée par Emanuele Viola, qui se remémora avoir refusé une offre du même éditeur pour une suite à leur Nathan Never, parce qu'il n'était payé que la moitié de ce qui avait été promis à l'origine. Il mentionna également être allé jusqu'à poursuivre l'éditeur pour obtenir la compensation promise, en vain. Alors que, selon lui, Nathan Never nécessita six mois de travail éreintant, Black Viper prit trois ans. Au final, il regretta de ne pas avoir accepté l'offre pour la suite, mais il avait quinze ans à l'époque et "n'en savait pas plus".

Le jeu fut développé à l'origine avec Marco Genovesi, un ami d'Emanuele Viola au lycée. Alors que leur plan initial était de développer un jeu de combat, ils le transformèrent en un jeu de course de moto. Ils s'inspirèrent de certaines de leurs séries animées préférées, comme Hokuto No Ken (Fist Of The North Star) et Mad Max, la mécanique de jeu étant un mélange de Street Hawk et de Road Rash. Leur projet, initialement intitulé "Dark Blade", fut presque terminé lorsqu'ils entrèrent en contact avec Light Shock Software, mais il leur manquait un éditeur. Marco Genovesi déclara : "Nous avons fait de notre mieux, car nous avons conçu le jeu sur un Amiga 500, et le faire tourner à 25 images par seconde au lieu de 50 a fait une grande différence en termes de jouabilité. Nous étions juste une bande de copains de lycée qui s'amusaient. A l'été 1994, alors que le titre était presque terminé, nous avons réalisé qu'aucun éditeur anglais ne serait intéressé par un jeu Amiga : le marché était moribond. Lorsque Light Shock Software est apparu, ce fut une expérience rafraîchissante !"

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Black Viper

Light Shock Software participa au débogage, au peaufinage et à l'amélioration du titre pour la sortie, en changeant le titre original et, surtout, en ajoutant une longue séquence d'introduction animée exclusive pour la version Amiga CD32, créée par Alberto Gelpi. Black Viper allait en fait devenir l'un des derniers titres officiels de la console Amiga. Marco Biondi se souvint qu'il s'agissait du premier titre envisagé pour l'accord d'édition avec Neo Software Produktions GmbH, une société autrichienne de développement et d'édition de jeux. "Ils avaient travaillé très dur sur le jeu et leur expérience se reflétait clairement dans le produit final. Il était pratiquement prêt lorsque D.E.X. nous a contactés. Il s'agissait simplement de le rendre plus attrayant pour le marché", commenta Marco Biondi.

Emanuele Viola se souvint avoir travaillé des heures et des heures avec Marco Biondi, à la recherche de bogues dans le code écrit en assembleur qui "était commenté aussi bien qu'un jeune de quinze ans aurait pu le faire à l'époque, en travaillant avec presque aucune expérience. À la fin, nous avons trouvé le tout dernier bogue qui a fait planter le jeu au tout dernier niveau". Il prit sa part de l'argent, qui s'élevait à 500 euros d'aujourd'hui, "ce fut beaucoup moins que ce que j'ai fait avec Nathan Never", et c'est tout.

Mais la véritable vedette de l'accord d'édition avec Neo, tout le monde en convint, était en fait Fightin' Spirit.

Le plat de résistance : Fightin' Spirit

Le projet de Fightin' Spirit naquit presque par hasard, se remémora Massimiliano Calamai. En feuilletant quelques magazines, il vit qu'une équipe du sud de l'Italie, Dynamic Style, travaillait sur un jeu de combat du genre SNK appelé Perpetual Craze. Light Shock Software leur téléphona et, très vite, Dynamic Style travailla jour et nuit avec les deux producteurs, corrigeant les bogues et ajoutant de nouvelles touches graphiques. Les graphismes furent créés par Giacinto Platania et la programmation par Dario Merola, tandis que tous les effets sonores et les voix des personnages furent créés par les membres de Light Shock Software et quelques amis proches, en les enregistrant dans une cave à travers un microphone bon marché.

L'équipe fit un excellent travail sur le plan graphique, en se rapprochant le plus possible d'un véritable jeu de combat de SNK sur Amiga. "Mais il n'y avait que peu ou pas de mécanique de jeu", se souvint Massimiliano Calamai, "nous avons donc dû la construire à partir de rien. En fin de compte, le projet a tellement poussé l'ECS de l'Amiga que nous avons dû couper certaines parties parce que, sinon, le jeu n'aurait pas tenu sur les disquettes !". Marco Biondi ajouta : "L'équipe s'est investie corps et âme dans Perpetual Craze, ils avaient à peine 18 ans à l'époque, ils étaient donc incroyablement passionnés par le projet". Il est juste de dire que Fightin' Spirit était un titre "fortement" inspiré des classiques du genre, tout en étant imprégné de plusieurs références à la culture pop des années 1980 et 1990 : du film Kickboxer de Jean-Claude Van Damme à un personnage conçu d'après Freddie Mercury lui-même.

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L'article d'Amiga Power

En effet, Perpetual Craze, sorti sur Amiga ECS, AGA et CD32, s'avéra être la principale attraction des deux titres ayant fait l'objet d'un accord avec l'éditeur autrichien Neo, lui-même une jeune société fondée seulement deux ans auparavant. Cette fois, c'est en fait l'éditeur qui insista pour changer le nom du titre de combat, en "Fightin' Spirit", apparemment plus facile à commercialiser. Mais il y eut un problème : le jeu arrivait vraiment au mauvais moment. Neo voulait un portage sur PC, sinon il n'aurait eu aucun intérêt à le publier, à tel point que, comme le rappella Massimiliano Calamai, "ils nous ont dit que, si nous le voulions, nous pouvions chercher un nouvel éditeur. Nous n'avons trouvé personne, je me souviens que Team 17 nous a dit que si nous leur avions montré Perpetual Craze trois ans auparavant, cela aurait été un succès ! Finalement, nous avons dû ravaler notre fierté et nous en tenir à Neo".

Francesco Iorio observa que le portage du projet sur PC - même pour 1995 - n'aurait guère été intéressant pour un éditeur international. "Un jeu de combat de style SNK pour MS-DOS, à l'époque, n'aurait eu pratiquement aucun débouché et Dynamic Style était si obstiné à vouloir le terminer et le sortir sur Amiga, qu'une éventuelle conversion n'a même pas été envisagée." L'équipe de Dynamic Style avait en fait travaillé sur un prototype qui pouvait fonctionner sur PC, mais ils renoncèrent rapidement à le terminer.

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Fightin' Spirit

Après avoir remporté le prix MCW Amiga du "Jeu de l'année" en 1996, le titre sortit et fut reçu avec des critiques plutôt correctes par des magazines comme Amiga CD32 et Amiga Format. Pourtant, à ce jour, il fut nommé plusieurs fois par le magazine Retro Gamer comme l'un des meilleurs jeux de combat en un contre un sur Amiga. Mais encore une fois, sans surprise, il ne se vendit pas en nombre impressionnant ou, en fait, ne se vendit pas du tout. Au milieu des années 1990, le marché de l'ordinateur de salon de Commodore se réduisit à de très petits chiffres. Marco Biondi commenta : "Je pense que s'il était sorti ne serait-ce que trois mois avant, les choses auraient été très différentes, mais nous travaillions aussi vite que possible". Le même problème affecta naturellement les ventes de Black Viper.

Massimiliano Calamai mentionna que Light Shock Software fit tout ce qui était en son pouvoir pour vérifier que Neo était de bonne foi. "Ils n'arrêtaient pas de rapporter que le jeu ne se vendait pas et, autant que nous puissions le vérifier, ces rapports semblaient être corrects. Fightin' Spirit ne nous a récompensés que spirituellement, puisque le produit fini était effectivement un jeu de combat fantastique ; économiquement, nous n'en avons rien tiré. C'était assez frustrant". Fightin' Spirit fut apparemment tellement demandé au Royaume-Uni qu'il fut réédité en 2000, uniquement sur CD, par Alive Mediasoft. L'hypothèse de Light Shock Software selon laquelle Neo ne fit pas d'efforts pour le distribuer fut donc probablement plus proche de la vérité (NDLR : il semble que Light Shock Software ne fut même pas au courant de cette réédition, ce fut sans doute une action solo, et illégale, de la part d'Alive Mediasoft).

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La réédition en CD de Fightin' Spirit au Royaume-Uni

En parlant de l'accord avec l'éditeur autrichien, Francesco Iorio confirma que l'accord global fut un désastre : "Nous n'avons pas reçu d'argent de tout l'accord, pas même une avance. Rien, vraiment, tout le travail sur Fightin' Spirit et Black Viper a été fait gratuitement, ce qui a fortement contribué à rendre l'équipe de mauvaise humeur, et évidemment à la nôtre aussi. Je pense qu'à la fin, Neo a peut-être fini par payer une partie du matériel Amiga sur lequel nous développions les jeux, mais c'est tout".

Direct avec un chasseur : Pray For Death

Le dernier titre publié par Light Shock Software fut Pray For Death, que Massimiliano Calamai considéra comme le travail de développement le plus important réalisé par le studio au cours de ses trois années d'existence. Le projet fut développé à l'origine par Vysio Arte Elettronica, une équipe dirigée par Carlo Gioventu et Sebastiano Del Gobbo, avec Valentino Eugeni comme programmeur principal et Mauro Alessandrini. Sebastiano Del Gobbo se souvint que "la plus grande partie du travail a été réalisée en équipe : modélisation et rendu des personnages à l'aide de LightWave 3D, ainsi que Real3D pour les champs de bataille".

Les trois hommes travaillèrent une année entière sur le titre, utilisant trois Amiga 4000, s'inspirant directement du jeu de combat technologiquement avancé Killer Instinct. À un moment donné, l'équipe a même voulu tout reconstruire à partir de zéro, afin de passer les graphismes en 640×480, mais elle s'est ravisée car Pray For Death avait déjà pris du retard. "Lorsque nous avons vu le titre pour la première fois, il n'était guère plus qu'une démo technique prometteuse", se remémora Massimiliano Calamai. "Impressionnés, nous avons décidé de présenter officiellement Vysio Arte à Light Shock Software. En plus de l'équipe originale, le travail ultérieur sur le titre, le développement, l'assurance qualité, etc. a été effectué par moi, Francesco Iorio, Marco Biondi et nos autres développeurs."

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Avant-première de Pray For Death sur PC Zone (Numéro 38, mai 1996)

Massimiliano Calamai nota que Killer Instinct fonctionnait sur un matériel très puissant dans les salles d'arcade, une puissance qui pouvait difficilement être reproduite sur un ordinateur personnel moyen du milieu des années 1990. Ils ont donc dû contourner les limites de la plate-forme, afin de maintenir le travail graphique impressionnant réalisé par Vysio Arte Elettronica, tout en essayant de le faire fonctionner avec des performances décentes. Présentés pour la première fois à l'ECTS en 1995, ils attirèrent l'attention de plusieurs sociétés, dont Virgin et Sony. La société japonaise voulait que le titre soit prêt pour Noël de la même année, afin de le lancer sur sa console récemment lancée, la PlayStation.

"Malheureusement, cela s'est avéré totalement impossible", se souvint Francesco Iorio, "le titre n'était qu'à moitié prêt, même si nous avions engagé plus de programmeurs pour nous aider, nous ne l'aurions jamais terminé dans les quatre mois que Sony nous avait accordés." Massimiliano Calamai poursuivit : "Il faut aussi considérer que la PlayStation n'avait pas assez de mémoire pour faire tourner Pray For Death tel qu'il avait été développé pour PC. Il s'agissait de 1 Mo de mémoire contre 16 Mo. Le jeu avait été conçu à l'origine pour être exécuté sur une plate-forme beaucoup plus puissante, nous pensions qu'il était fait sur mesure pour l'ordinateur. Je me souviens que les arrière-plans étaient rendus en laissant les ordinateurs travailler toute la nuit, chacun prenant jusqu'à douze heures". Francesco Iorio expliqua encore que "nous avons ajouté plusieurs images pré-rendues et une caméra mobile pour donner l'impression que les arrière-plans tournaient réellement dans un espace 3D, d'une manière qui ressemblait à l'effet présent dans Killer Instinct II".

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Test de Pray For Death par le magazine italien PC Game Parade

En fin de compte, ce qui fut le dernier titre de Light Shock Software fut publié par Virgin Interactive, qui subit bientôt une importante réévaluation. "Au moins, nous avons reçu une petite avance, qui a été consacrée à l'achat de machines plus puissantes pour développer le jeu le plus rapidement possible, ainsi qu'au paiement d'énormes factures de téléphone pour transférer les données avec des modems à 14 400 bauds (les plus rapides de l'époque) et à l'envoi de piles de disquettes", raconta Francesco Iorio.

Marco Biondi se remémora que Pray For Death avait demandé le plus de travail de tous leurs titres, notamment parce que Virgin semblait vouloir traquer le moindre bogue. "On nous télécopiait des pages et des pages de choses à corriger. Le plus étrange était probablement le bogue qui faisait planter le jeu après 37 minutes de pause ! Je me demande encore aujourd'hui comment ils ont pu découvrir ce bogue. Essayer de le reproduire et de le corriger, c'était une sorte de cauchemar". À cette époque, Marco Biondi était également chargé de toutes les relations publiques et de la commercialisation, puisqu'il était le meilleur anglophone de l'équipe.

Le souvenir le plus marquant de Matteo Tesser concernant son travail sur ce jeu de combat fut d'avoir dû créer un algorithme de compression à partir de zéro, avec Marco Biondi, en travaillant de nuit pour faire tenir la vidéo d'introduction sur un seul CD. "À l'époque, il n'y avait aucun moyen de compresser un fichier vidéo. J'ai donc écrit quelque chose qui pourrait être considéré comme une sorte de livre blanc de l'algorithme MPEG original. Bien qu'il ne transformât pas vraiment les fréquences, mais les compressait, il tenait à peine debout avec de la colle, mais au final, nous avons réussi à le faire fonctionner suffisamment longtemps pour que la vidéo fonctionne bien et que la taille du fichier soit correcte. Aujourd'hui encore, je suis étonné de tout ce que nous avons pu faire sans guide ni aide extérieure !".

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Pray For Death

À un moment donné, l'équipe dut également faire face à une pénurie de CD inscriptibles en Italie, en raison de la guerre permanente contre le piratage. "Finalement, je n'ai pas eu d'autre choix que de téléphoner à Virgin pour leur dire que nous n'étions pas en mesure de leur envoyer le prototype", indiqua Marco Biondi, "et dès le lendemain, une énorme pile de CD vierges est arrivée ! Nous étions sauvés !". Revenant sur l'accord d'édition, Massimiliano Calamai commenta : "Virgin a fait de nous une partie de son équipe, ce qui d'un côté était une chance, mais de l'autre, cela signifiait que nous ne pouvions plus vraiment décider de quoi que ce soit par nous-mêmes." Pray For Death sortit avec des critiques majoritairement mitigées et médiocres de la part de la presse, mais Sebastiano Del Gobbo en fut tout de même heureux : "Nous avons été très peu payés, ce qui nous a déçus, mais c'était vraiment excitant de voir notre jeu publié internationalement par Virgin".

Apparemment, selon Carlo Gioventu, Virgin vendit 30 000 exemplaires de Pray For Death en une semaine, s'épuisant en très peu de temps, mais l'éditeur ne semblait pas avoir l'intention de le rééditer. Il blâma ensuite l'accord entre Light Shock Software et Virgin, et le fait que l'éditeur anglais semblait plus intéressé par la promotion de ses énormes sorties de 1996, comme Broken Sword, que par un jeu qui avait déjà rentabilisé le peu d'argent que Virgin y avait investi.

Light Shock Software après 1996 : jeux inédits et projets futurs

En 1996, alors que Virgin se désengagea et changea d'organisation pour être vendu à Electronic Arts, Light Shock Software fut pris dans le tourbillon. "Nous avions déjà discuté avec les cadres de Virgin pour savoir sur quoi nous étions censés travailler après Pray For Death, mais à la fin, toutes les conversations se sont tout simplement arrêtées" mentionna Francesco Iorio. Virgin, sous une nouvelle direction, décida de réduire ses équipes les plus récentes et les moins expérimentées, et naturellement le studio italien fut parmi les premiers à être licenciés. Light Shock Software ferma ses portes fin 1996, tout en s'essayant à la trousse de développement PlayStation sur quelques titres potentiels. Francesco Iorio et Massimiliano Calamai se souvinrent également avoir voulu prendre deux directions différentes, ce qui, ajouté au manque de fonds et d'éditeur, contribua à se lancer dans d'autres projets.

Mais qu'en était-il des projets originaux en cours de réalisation chez Light Shock Software ? Marco Biondi se souvint de WIN : un acronyme pour "Working In the Night", puisqu'ils le développaient et y jouaient pendant de longues nuits. Il s'agissait d'un jeu de course vue de haut, dans la veine de Micro Machines, auquel l'équipe jouait en réseau local. "Nous ne pouvions pas vraiment le sortir tel quel, et c'est donc un projet sur lequel j'ai travaillé pour une sortie sur Internet des années plus tard."

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WIN

Tout en travaillant sous le nom de "Holografix", Matteo Tesser et Francesco Iorio consacrèrent également leur temps sur Q-Star System, un jeu de tir 2D classique se déroulant dans l'espace. Holografix travailla sur ce jeu de 1992 à 1994, ainsi que sur d'autres travaux réalisés avec Massimiliano Calamai, pendant leurs années chez Light Shock Software. Les deux premières versions de démonstration de Q-Star System sont maintenant disponibles gratuitement, grâce à Francesco Iorio et Matteo Tesser.

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Q-Star

Parmi les autres projets qui ne virent jamais le jour, il y eut Run Ball, presque entièrement réalisé par Massimiliano Calamai, qui reprenait le style de jeu de SNK Windjammers, mais avec une saveur plus orientée Mortal Kombat et un style plus direct. Le titre n'était que partiellement terminé, avec un seul personnage entièrement conçu et animé, un outil basé sur Amiga pour gérer les animations et les arrière-plans des joueurs, et une petite démo fonctionnant sur PC. Un autre projet était un jeu de course vue de haut, appelé "Usa Racing" dans un article d'Amiga Power, puis renommé par Cesare Di Mauro, le programmeur principal, en "World Racing". Le travail sur ce projet n'alla pas très loin parce que - encore une fois - apparemment aucun éditeur n'était intéressé par la publication d'un jeu de course vue de haut, sur Amiga ou PC, donc il fut abandonné.

Light Shock Software
Image de l'article sur la préversion de Run Ball

"En y repensant maintenant, je suis presque effrayé par ce que nous avons réussi à accomplir avec Light Shock Software : nous avons vraiment repoussé les limites de la technologie de l'époque. Je n'aurais probablement jamais eu le courage d'envisager, même de loin, de faire quelque chose comme ça aujourd'hui ! Aujourd'hui encore, ce fut l'un des meilleurs moments de ma vie", se souvint Massimiliano Calamai. Marco Genovesi mentionna que Light Shock Software et son équipe s'intéressaient aux histoires d'adolescents luttant contre des obstacles écrasants, armés seulement de leurs rêves et de leur talent, créant quelque chose à partir de rien. "Je vois la beauté de cela et je parie que si nous étions dans un film des années 1980, cela aurait également une fin heureuse".

Malheureusement, les derniers mois dans ce studio de développement furent entachés par des discussions houleuses des personnes particulièrement en colère contre Francesco Iorio et Massimiliano Calamai. "Je pense que le jeune âge de tout le monde (j'étais le plus âgé à 24 ans !) les a amenés à croire que leurs jeux étaient tellement beaux, amusants à jouer et uniques qu'ils étaient censés se vendre comme des petits pains. Ainsi, lorsqu'ils finirent par voir la médiocrité des ventes, la faute a été rejetée sur la direction et le contrat avec Neo et Virgin. J'espère vraiment que tout le monde s'est calmé, mais sinon, je suis tout à fait disponible pour en parler", conclut Marco Biondi.

L'histoire de Light Shock Software fut également caractérisée par le fait que des personnes passionnées se trouvèrent au mauvais endroit au mauvais moment. Les différentes équipes travaillaient sur des plates-formes qui, bien qu'ayant encore de nombreux fans en Italie, étaient déjà obsolètes dans la plupart des autres pays. Pour ne rien arranger, ils n'étaient pas très intéressés par la vente des jeux en Italie, mais avaient clairement l'oeil sur le marché étranger, et ont fini par conclure un accord d'édition avec Neo qui laissa tout le monde insatisfait.

Malgré leurs talents évidents, les équipes étaient toujours composées principalement de jeunes aux yeux brillants, à peine en âge de travailler. Malgré leur dévouement, il est clair qu'ils n'étaient pas intéressés par des études du marché qui auraient permis de décider si un titre pouvait avoir du succès ou non. En tant que projets passionnés, ils ne brillèrent que très brièvement, comme une lumière dans l'obscurité, mais ces deux secondes étaient vraiment quelque chose à voir.

Où sont-ils maintenant ?

Light Shock Software continue d'une manière ou d'une autre, avec certains des anciens membres travaillant toujours sur quelques titres dans l'industrie du jeu :
  • Massimiliano Calamai, après avoir collaboré avec Artematica, travaille toujours dans l'industrie du jeu.
  • Francesco Iorio a travaillé chez Revolution Software, en tant que programmeur principal sur "Broken Sword: The Sleeping Dragon", entre autres choses, et vit maintenant au Canada.
  • Marco Biondi vit à Firenze et travaille dans l'informatique, Matteo Tesser travaille également dans l'informatique.
Sources et références
  • Entretiens avec Marco Biondi, Massimiliano Calamai, Francesco Iorio et Matteo Tesser réalisés via Skype entre 2020 et 2021.
  • Magazines : The Games Machine, Amiga Power, Amiga CD32 Player.
  • "A Trip Down Light Shock Software Lane" de Dreamkatcha, sur archive.org.
  • Un grand merci à toutes les personnes avec lesquelles je me suis entretenues, pour le temps qu'elles m'ont accordé et pour m'avoir fourni certains jeux pour l'article, ainsi qu'à Dreamkatcha pour son incroyable travail sur la rétrospective.
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