|
|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
|
La compagnie anglaise la plus prestigieuse, dont le nom et le logo se sont répandus dans le monde entier comme une traînée de poudre, par qui enfin les premiers jeux 16 bits sont nés, ne donnait plus de nouvelles depuis la sortie de Lemmings. Aujourd'hui, en exclusivité pour Génération 4, Ian Hetherington dévoile tout de sa société, de l'après Lemmings aux premiers produits consoles, des premiers CD à ceux du futur. Stéphane Lavoisard ne s'en est toujours pas remis... ![]() Ian Hetherington C'était il y a sept ans. Souvenez-vous, vous qui aviez acheté un Atari ST à peine cet ordinateur sorti en France, de ce jeu en moyenne résolution et en quatre couleurs répondant au nom de Bratacas. Très difficile à jouer (car se jouant uniquement à la souris), ce fût tout simplement le premier jeu Psygnosis, mais aussi l'un des premiers jeux 16 bits à côté de Time Bandits, Ultima III, Mudpies et autres Hexagon. A la différence des autres compagnies de l'époque, Psygnosis est toujours là, mais la petite société de trois personnes est aujourd'hui composée de plus de 80 personnes, et disposent d'une renommée mondiale sans précédent. Le secret d'un tel succès ? Un aspect personnel, du logo au titrage des jeux en passant par la boîte, mais aussi la réalisation. Un produit Psygnosis, ça se reconnaît tout de suite. Le succès commence avec Barbarian, un jeu d'arcade/aventure qui sur Amiga et Atari ST sera un des succès de l'année 1988. Un peu plus tard, viendront Shadow Of The Beast puis Shadow Of The Beast 2, Awesome et d'autres titres somptueux. Psygnosis devient vite une marque à part, avec ses introductions splendides, ses jeux presque injouables et toujours ses splendides jaquettes... jusqu'au jour où l'équipe de DMA Design, un des groupes qui programment pour Psygnosis, viennent présenter Lemmings. Le jeu sort en 1990 sur Amiga, PC et Atari ST, mais la licence sera bientôt vendue pour Nintendo, Game Boy, Super Nintendo et j'en passe... Avec Lemmings, Psygnosis casse son image. Le visuel de Lemmings est moche, l'introduction est certes drôle mais pas splendide... mais le jeu est génial, ultra-jouable, et conquiert vite le monde entier. L'après Lemmings, c'est une fausse suite, Oh No! More Lemmings, un super jeu de tir, Agony, et d'autres produits plus moins réussis. Mais en deux ans, qu'ont donc bien pu faire les responsables de Psygnosis de l'argent gagné avec Lemmings ? Le mystère plane. Enfin, planait. Avec Johnathan Ellis, Ian Hetherington dirige la société Psygnosis depuis ses débuts. Très calé sur tout ce qui concerne la technique, Ian fût aussi l'auteur "malheureux" de la première version d'Aquaventura. Le programme, dérobé pendant un salon anglais, devra être entièrement refait et ne sorti que quatre ans plus tard ! ![]() Tout à fait. Dès que je l'ai vu, j'ai pris mon téléphone pour joindre Johnathan et je lui ai dit "nous tenons notre Tetris !". ![]() Lemmings bien sûr, suivi de Shadow Of The Beast, Barbarian et je pense Armour-Geddon. ![]() Eh bien, nous sommes entrés dans ce que je me permettrais d'appeler l'ère post-Lemmings. Notre ressource principale demeurera les jeux sur micro-ordinateur... mais nous préparons bien d'autres choses. Par exemple, nous sommes connus pour être très calme au niveau des consoles ; jusqu'à maintenant, nous vendions les licences de nos jeux à d'autres éditeurs. Le vrai problème, c'est qu'avant de faire des jeux sur consoles, il faut déjà avoir d'excellents jeux, et c'est ce que nous avons attendu. Je peux donc déjà vous annoncer que très bientôt, nous éditerons nous-mêmes, à travers le monde, des jeux pour toutes les consoles 16 bits ! ![]() Nous avons deux jeux que nous préparons depuis longtemps pour Mega Drive ; Puggsy et Wiz & Liz, mais nous proposerons également Lemmings 2 et Walker, et pas seulement sur Mega Drive ! Cependant, nous continuerons à vendre certains titres à d'autres éditeurs. ![]() Tout à fait, et c'est pour cela que nous n'avons pas voulu nous y aventurer trop vite. On se dirige vers deux pôles : consoles et Amiga contre PC et Amiga. Côté micro-ordinateurs, comme la plupart des éditeurs, nous allons donc de plus en plus développer pour PC. ![]() Pour ce qui est des produits CD-ROM, nous avons eu deux tentatives qui sont tombées à l'eau. Nous avons failli faire Star Wars pour la Lucasfilm et Terminator 2 pour Acclaim, mais en raison de problèmes de droits, aucun des projets n'a pu aboutir. Cependant, nous sommes très en avance sur nos propres produits CD. Nous avons, en effet, un département Recherche & Développement qui a travaillé plus de deux ans sur des méthodes de travail pour le CD. Je leur avais fixé comme but de nous permettre de faire de véritables films interactifs, et ils ont donc travaillé sur des techniques de compressions d'images et bien d'autres choses. ![]() Oui, mais pendant que d'autres sortaient des compilations sur CD ou remplissaient les CD uniquement en y ajoutant des heures de musique. Les produits CD qui sont déjà sortis sur le marché n'ont rien d'incroyables. Ils n'utilisent pas du tout les possibilités d'une telle machine. ![]() Tout à fait. Le CD va réussir, c'est obligé. Le marché devrait débuter aux alentours du troisième mois de 1993, et devrait rapidement avoir une part importante du marché. Le CD va réussir pour de nombreuses raisons ; cela représente tout de même 1200 fois la capacité d'une cartouche, et alors qu'il faut près de trois mois pour obtenir des cartouches sur le marché à partir du moment où votre produit est fini, il suffit de trois jours sur CD... Et je ne parle même pas des prix de fabrication, qui sont extrêmement moins élevés. Alors, pourquoi le CD échouerait-il ? Le vrai problème, c'est que les gens ne savent pas quoi faire d'un CD, et que certains n'y croient pas. Depuis que nous avons montré les vidéos de nos produits au C.E.S. de Chicago, les gens y croient, et savent que c'est la prochaine génération de jeux vidéo. ![]() Origin, puisqu'on peut presque dire qu'ils font des produits CD sur disquettes ! Electronic Arts a certainement les personnes et le matériel pour faire de bons produits. Et puis Infogrames, qui je sais ont fait beaucoup d'efforts, leurs jeux CD-I sont très bons, et ils sont bien avancés en matière d'animation. ![]() En Europe, actuellement, je dirai que nous devons faire face à Virgin et MicroProse. Mais nous avons pris l'avantage de commencer très tôt à travailler sur le CD, comme nous avions été les premiers à commercialiser des jeux 16 bits. Le passage au CD sera un passage difficile pour beaucoup. Ce n'est pas une simple amélioration, c'est un concept nouveau, que tout le monde ne réussira pas à aborder. Cependant, n'oublions pas que le succès vient de la qualité des produits, pas de la technologie. ![]() Tout à fait. C'est un excellent produit. Je ne comprends pas pourquoi ils l'ont fait en Super VGA, parce que ça réduit considérablement l'audience possible. Mais c'est un jeu foncièrement différent des nôtres. Je crois qu'ils ont trouvé le bon terme en l'appelant "drame interactif". Le produit vise plutôt la cible des possesseurs de PC, âgés, alors que nous visons le public de Sega et Nintendo. Nos jeux CD sont des jeux d'action, pas des jeux d'aventure. ![]() Les machines CD d'aujourd'hui ont plus ou moins toutes 1 Mo de mémoire, 256 couleurs, une résolution de 300x200 et tournent à 150 ko par seconde. La seconde génération de machines aura une résolution vidéo, tournera à 40 MIPS et chargera deux fois plus vite. Ce qui me fait plaisir, c'est que très peu d'éditeur arrivent à remplir les machines d'aujourd'hui, alors autant dire qu'ils seront encore plus largués sur les nouvelles... et la première arrive chez nous dans six semaines. ![]() Normalement, elles seront disponibles d'ici Noël 1993. Franchement, j'estime qu'il y a au maximum deux ou trois compagnies capables de faire de vrais produits CD actuellement, ce qui représente une cinquantaine de personnes... et nous en avons beaucoup chez nous. Vous savez, quand les gens vont découvrir Dracula dans tes colonnes, même s'ils voulaient faire la même chose au plus vite, je pense qu'il leur faudrait au moins deux ans. Tout ça parce que nous sommes les seuls à avoir fait de la recherche fondamentale pendant autant de temps. ![]() Sur CD-ROM PC, Macintosh, Amiga mais aussi sur Mega-CD quand il sera sorti et sur CD-ROM Super Nintendo. Mais j'ai un peu peur que celui-ci arrive trop tard. Les nouvelles machines dont je parle seront déjà disponibles. Attention, cela ne veut pas dire que nous allons arrêter les jeux sur disquettes. Nous ne sommes pas près d'arrêter, d'autant plus que cela représente notre principale source de revenus. ![]() Oui, en effet. Nous sommes une compagnie très profitable, et tout ce que nous avons pu gagner, avec Lemmings par exemple, a été réinvesti dans le département de Recherche & Développement. Nous avons tout de même acheté six stations Silicon Graphics, reliées à un Mac 24 bits, un réseau et j'en passe. Les deux années de recherches ont coûté à peu près un million de dollars. Chaque jeu coûtera environ 700 000 $. Il faut en gros dix personnes par projet, et entre douze et quinze mois de travail. Pour Dracula, nous essayons de compresser ce temps à dix mois seulement, puisque nous n'avons signé la licence qu'en juillet 1992, et que le jeu doit sortir fin mars 1993, en même temps que le film. ![]() Le marché des micro-ordinateurs augmente de 10% tous les ans. Si jamais ils devaient baisser un jour, il ne baisserait que de 10% tous les ans. Par contre, les consoles sont menacées. La courbe de vie des consoles comporte toujours une énorme amplitude, mais sur une période donnée. Le jour où les machines CD seront bien mieux que les CD-ROM des consoles, le marché de la console pourrait très bien retomber très vite à zéro ! ![]() Hollywood représente environ 80 milliards de dollars, le marché du jeu vidéo, c'est 120. Entre les deux, il va se créer une intercommunauté qui produira du CD-ROM. Notre avantage, c'est qu'aujourd'hui encore, nous sommes très en avance par rapport aux autres éditeurs, mais surtout à ces grosses compagnies. Nous avons présenté Dracula à Hollywood, et je peux vous dire que nous n'avons aucun problème depuis pour obtenir les droits d'un film. D'ailleurs, nous en avons signé deux autres, que je ne peux pas encore révéler... C'est normal, Hollywood a enfin compris que le jeu vidéo était un marché énorme, et ils veulent d'excellentes adaptations. En plus, si les jeux deviennent de véritables films interactifs, ils apporteront un nouveau public au film, ce qui n'était pas le cas jusqu'à aujourd'hui. ![]() Oui... mais le problème, c'est que personne ne sait vraiment ce que doit être un film interactif. Tout le monde veut en faire, mais de quoi s'agit-il au fait ? Dracula représente un début de réponse. Selon moi, la force du cinéma par rapport aux jeux vidéo, c'est l'aspect émotionnel. Jamais un jeu vidéo n'a fait pleurer quelqu'un, et c'est selon moi la différence avec un film interactif. Vous pouvez y ajouter un côté émotionnel totalement inexistant aujourd'hui. Vous imaginez, non seulement le héros meurt, mais en plus, vous auriez pu le sauver ! ![]() Comme la licence a été signée tardivement, le film était déjà tourné, mais nous avons eu pas mal d'extraits en vidéo, des photos des décors et puis c'est à peu près tout. ![]() Si ! Nous utilisons des extraits du film par moment, pour passer d'une scène à une autre, mais nous n'utilisons pas du tout les acteurs. Franchement, il y a des problèmes de droits, et puis, d'après moi, il faudra au moins dix ans avant d'avoir la possibilité de profiter d'un tournage de film pour filmer des scènes supplémentaires pour un film interactif sur CD ! ![]() C'est vrai, mais le CD est vraiment une nouvelle technologie, et il faut s'y habituer. Tant que les jeux ne nous semblaient pas assez bons, nous avons préféré les laisser tomber. Nos premiers produits, Dracula et Microcosm, devraient sortir aux environs de mars/avril 1993. Mais nous aurons travaillé sur quatre à cinq produits CD en 1992, dix à douze en 1993 et je pense une quinzaine en 1994, époque où le CD devrait vraiment régner sur le marché. ![]() Encore une fois, les grosses compagnies ont cette fâcheuse tendance de vouloir faire paraître de nombreux titres. Quand on pense que la plupart des titres CD aux États-Unis présentent uniquement de simples améliorations sonores d'anciens jeux, il n'y a pas de quoi se faire du souci. De plus, ces grosses sociétés ne peuvent pas investir en recherches, et la différence se fera vraiment à ce niveau-là ! ![]() Très souvent, nous travaillons pour les constructeurs afin de tester leurs machines. Ainsi, nous avons déjà fait deux démos pour le CDTV de Commodore. Mais c'est tout ! Nous n'envisageons pas de développement spécifique sur ces machines pour le moment. ![]() Nous ne sommes pas près d'aller au Japon. C'est un marché très difficile, et surtout une civilisation bien différente de la nôtre, très complexe à aborder. ![]() Okay, c'est bien parce que c'est vous, alors voilà, l'un des films sera certainement un gros succès de 1993, et il s'agit de $!/ù*¤[% et l'autre, c'est tout simplement *§;|-#}&. ![]()
|