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A propos d'Obligement
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David Brunet
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Entrevue avec Roberta Williams
(Entrevue réalisée par Dany Boolauck et extraite de Tilt - mars 1991)
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Voici une entrevue avec Roberta Williams. La créatrice des King's Quest parle...
Roberta, beaucoup
de nos lecteurs vous admirent et voudraient en savoir un peu plus sur vous. Quels sont les événements qui vous
ont amenée à devenir auteur de jeux d'aventure sur micro ?
Tout a réellement commencé vers la fin de l'année 1979. J'étais à Los Angeles avec mon mari, Ken,
qui y travaillait comme programmeur. Je pense que c'était l'époque où l'Apple II fit sa première
apparition. Et Ken en voulait un ! Avoir un ordinateur chez soi en 1979 paraissait bizarre, surtout
pour moi car je savais que Ken travaillait sur d'énormes ordinateurs pour des choses rébarbatives
telles que la gestion des salaires, les taxes, etc. En outre, un tel achat représentait beaucoup
d'argent (12 500 FF), plus que nos revenus mensuels.
L'arrivée de l'Apple II chez nous n'a pas immédiatement bouleversé notre vie. La première étincelle
est venue d'ailleurs. Un jour, Ken a apporté à la maison un terminal afin de pouvoir travailler.
C'était un de ces vieux terminaux (révolutionnaire pour l'époque !) qui ressemblait à une machine à
écrire, relié par modem (le vieux modèle où l'on utilise le combiné du téléphone) à l'ordinateur central.
Il n'y avait pas de moniteur, en fait, une imprimante faisait office d'écran et affichait toutes
les entrées et sorties des données ! C'est sur ce terminal bizarre que j'ai joué à mon premier jeu
d'aventure ! Ken s'était connecté à un ordinateur central qui proposait un jeu d'aventure textuel
nommé Colossal Cave. On ne pouvait y entrer que des commandes verbe-nom, du genre "go north".
J'ai tellement adoré cela que j'ai demandé à Ken s'il y avait des jeux d'aventure similaires sur
l'Apple II. On s'est rendu compte par la suite qu'il y en avait très peu sur micro, principalement
ceux de Scott Adams (label Adventure International). J'ai joué à tous les jeux disponibles sur le
marché mais je ne les ai pas trouvés aussi bons que Colossal Cave. C'est à ce moment que j'ai été
tentée d'en écrire un moi-même. Voilà comment est né Mystery House. Rappelez-vous, à l'époque, il
n'y avait que des aventures textuelles sur le marché. Introduire des graphismes dans Mystery House
était à mon sens le meilleur moyen d'offrir un "plus" décisif par rapport à la concurrence.
Malheureusement, il n'y avait pas d'utilitaire graphique disponible sur Apple II (en 1980). Ken
a donc mis au point un utilitaire graphique capable d'intégrer les images à mon jeu.
Je suppose
que vous faisiez tout cela pendant vos heures de loisir ?
J'avais tout mon temps puisque j'étais femme au foyer. Ken, lui, travaillait sur Mystery House pendant
ses heures de loisir.
Je poursuis mon histoire... Le jeu étant terminé, nous avons passé une annonce
dans Micro Magazine ! Nous avons immédiatement été inondés par un flot de commandes. C'était prévisible
car il s'agissait du premier jeu d'aventure graphique sur le marché. Tous les possesseurs d'Apple voulait
absolument l'avoir. Nous avons passé des heures à la duplication sur notre Apple II ! Je m'occupais
également des envois, de la comptabilité, et j'écrivais un nouveau scénario (Wizard And Princess,
en couleurs par-dessus le marché !). Cela a duré six mois jusqu'au moment où nous avons décidé de
nous lancer plus sérieusement dans cette entreprise d'où la création de Sierra On Line.
On connaît
le reste de l'histoire avec le succès des King's Quest. J'aimerais avoir maintenant votre opinion sur
l'évolution de notre secteur économique et la place que pourrait y prendre une compagnie comme la vôtre.
Si l'on compare notre industrie à celle du cinéma, nous sommes encore en 1929, c'est-à-dire le passage
du cinéma muet au film parlant. Nous allons faire un bond fantastique dans les années à venir et
rejoindre le monde du divertissement, notamment le cinéma. C'est grâce à la couleur, au son et aux effets
spéciaux que le cinéma est devenu cette gigantesque industrie. Quand les ordinateurs seront en mesure
d'offrir la même chose à un prix raisonnable (ce qui ne saurait tarder), nous le ferons, ce fameux bond.
Je pense au CD-ROM et au CDI.
Le développement
de produits sur CDI, par exemple, sera, selon les professionnels, très coûteux. Beaucoup pensent que
les éditeurs de jeux sur micro ne pourront pas suivre, à moins d'être aussi puissant que Walt Disney ou
Lucasfilm. Qu'en pensez-vous ?
C'est probablement vrai, et Sierra tente actuellement de se donner les moyens pour suivre le courant.
King's Quest V, par exemple, a été conçu en prévision d'une édition sur CD-ROM. Ce produit nous a
coûté un million et demi de dollars et nous avons dû adopter des techniques de développement proches
du dessin animé. Aurons-nous les moyens financiers et humains pour développer des produits encore
plus ambitieux ? Je pense que oui.
King's Quest V
Vous
en êtes à King's Quest V qui, si j'en crois les chiffres, connaît un succès fou aux États-Unis sur PC.
On parle de 200 000 pièces vendues ! Dites-moi franchement, n'en avez-vous pas assez de créer
des suites aux King's Quest ?
(Rires). Comment peut-on être blasé dans ce milieu qui bouge tout le temps ? Je ne peux pas dire
que je m'ennuie, par contre je me pose des questions sur mon talent d'auteur !
Les succès
de vos titres en sont pourtant une preuve.
Oui mais... Tenez, je vais vous raconter une anecdote édifiante. Il y a quelques jours, s'est tenue
à Sierra une conférence qui réunissait les directeurs de la société. La question du jour était de
savoir pourquoi King's Quest V avait connu un tel succès. Tous ont répondu que cela était dû aux
graphismes en VGA, au son, à l'image de marque de la série, etc. Bref, le succès était dû à l'aspect
technique du jeu ! Cela vous donne à réfléchir, en tant qu'auteur !
Maintenant, supposons que tous les jeux d'aventure bénéficient de la même technologie que King's Quest V.
On en reviendrait à déterminer la qualité du jeu par son scénario. J'avoue que c'est cela qui
me fait peur. Quand ce moment viendra, serais-je reconnue comme un bon auteur ? Voilà la question
qui me préoccupe !
Vous
ne savez pas si vous avez du talent, c'est bien ça ?
Absolument. Il n'y a pas suffisamment de concurrence sur la place pour se faire une idée de mes capacités.
Mais n'est-ce
pas stimulant de chercher à savoir ce qu'on vaut ?
C'est stimulant et effrayant à la fois. Comment mes jeux seront-ils perçus dans cinq ans,
quand il y aura sur la place des jeux de grande qualité ? Seront-ils ennuyeux, sans personnalité ?
Je ne sais pas et cela m'angoisse.
Avez-vous
pensé à changer de registre. Je veux dire, faire autre chose que les King's Quest ?
Oui et je vais en fait tenter un nouveau genre de jeu d'aventure. J'ai essayé le mystère avec Colonel's Bequest,
mais le résultat n'a pas été très satisfaisant à mes yeux. Cette fois-ci, je me lance dans le genre
Indiana Jones.
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