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Le Minitel (pour "Médium Interactif par Numérisation d'Information Téléphonique") désigne un type de terminal informatique destiné à la connexion au service français de Vidéotex baptisé Télétel, commercialement exploité en France entre 1980 et 2012. ![]() Minitel 1 de 1982 Cette technologie de communication à la porteuse caractéristique (fréquence au sifflement aigu) a été développée par le ministère des Postes et Télécommunications et utilisée en France, essentiellement dans les années 1980 et 1990, avant d'être supplantée par l'accès à Internet. Par métonymie, le mot "Minitel" a fini par désigner l'ensemble du service Vidéotex en France ainsi que les éléments de réseau (concentrateurs, points d'accès) destinés à rendre ce service. En février 2009, selon le groupe France Télécom, le réseau de Minitel enregistrait encore 10 millions de connexions mensuelles sur 4000 codes de services Vidéotex, dont un million sur le 3611 (annuaire électronique). En 2010, 2 millions de personnes utilisaient encore le Minitel, pour 200 000 euros de chiffre d'affaires. Le service a été fermé par France Télécom le 30 juin 2012. L'arrêt du Minitel est une conséquence de la décroissance des usages et de la fermeture du réseau support de l'offre Minitel. Ce réseau support étant de moins en moins utilisé, et compte tenu des évolutions technologiques, il a été décidé d'arrêter son exploitation. Contexte historique En 1977, la remise à Valéry Giscard d'Estaing, président de la république française, du rapport sur l'informatisation de la société, rédigé par Simon Nora et Alain Minc, va entraîner une révolution technologique baptisée par les auteurs du néologisme "télématique" défini comme la connexion de terminaux permettant la visualisation de données informatiques stockées dans des ordinateurs à travers les réseaux de télécommunications. L'année suivante, en 1978, la France décide de lancer un réseau vidéotex accessible par un terminal peu onéreux. Cette décision sera rendue publique par Gérard Théry (directeur de la DGT) à l'Intercom 79 de Dallas (Texas) qui réunit le gratin mondial des télécommunications. Il y annonce avec une certaine emphase le déclin de l'ère du papier. Le concurrent américain du Minitel se nommait en effet le système NAPLPS. Conçu comme vecteur de vente à domicile, il mettait l'accent sur un affichage en couleurs de qualité photographique. Suite au faible débit des lignes de l'époque - surtout aux États-Unis - la déception fut sévère :
En 1997, le Minitel rapportait six milliards de francs. Le programme Télétel (nom du réseau des terminaux appelés Minitel) est reconnu dans le monde entier comme le premier réseau télématique grand public et comme un succès commercial. Par la suite, les services commerciaux du Minitel ont subi la concurrence d'Internet. Inventeur Directeur technique du Centre Commun d'Études de Télévision et Télécommunications à Rennes, Bernard Marti a coordonné les travaux d'une équipe à l'origine du Minitel, le projet Minitel étant supervisé par Jean-Paul Maury, directeur du projet "Annuaire Électronique et Minitel" (1979 - 1985). D'après Bernard Marti, le nom "Minitel" serait l'abréviation de "Médium Interactif par Numérisation d'Information Téléphonique". Dans le film "La Personne Aux Deux Personnes" (2008), un faux journal télévisé animé par Patrick Poivre d'Arvor annonce le décès par accident, à l'âge de 78 ans, de l'inventeur du Minitel : l'ingénieur Jean-Yves Pouchard. Expérimentation La phase d'expérimentation commence en 1980 à travers plusieurs opérations sur le terrain : Annuaire électronique Alors qu'il est prévu de fabriquer 30 millions de Minitel, Valéry Giscard d'Estaing, devant le lobby de la presse qui voit un concurrent dans cette nouvelle technologie, se ravise et décide de lancer des expérimentations. En juillet 1980, à Saint-Malo, les 55 premiers utilisateurs de l'annuaire électronique sont équipés. En 1981, 4000 Minitel sont distribués en Ille-et-Vilaine. Il s'agit de tester ce nouveau service chargé de remplacer l'annuaire papier. Il devait aussi alors alléger le service traditionnel des renseignements, passablement saturé devant la croissance du parc téléphonique fin des années 1970. Il se justifiait aussi par l'efficacité d'un service de renseignements recouvrant l'ensemble des abonnés au téléphone en forte croissance. Les publications des annuaires papier, constamment dépassées, créaient une forte demande sur les renseignements téléphoniques alors assurés par des fonctionnaires des PTT. ![]() Un des 55 premiers terminaux distribués à Saint-Malo Expérience Télétel 3V À l'automne 1980, 2500 foyers volontaires de Versailles, Vélizy-Villacoublay, Jouy-en-Josas, Buc, Bièvres et Les Loges-en-Josas reçoivent un terminal Vidéotex. Du côté des services, près de 200 fournisseurs participent à l'expérience, se donnant ainsi l'occasion de tester ce nouveau moyen de communication auprès du public. Les services remportant la plus large adhésion seront les annuaires téléphoniques pages blanches et pages jaunes (services gratuits), la presse, la vente par correspondance, la SNCF, les banques ainsi que la messagerie. ![]() Terminal Télétel utilisé à Vélizy en 1980 À Vélizy, le premier terminal n'a pas d'écran et se glisse sous le téléviseur : simple décodeur, il permet de consulter une vingtaine de services sur l'écran du téléviseur. La télécommande est élémentaire : juste un clavier alphanumérique en majuscules. Un groupe d'utilisateurs passionnés fonde l'AATEL (Association des abonnés à TéléTEL), qui devient une véritable interface entre les testeurs et la DGT - DACT (Direction Générale des Télécommunications - Direction des Affaires Commerciales et Télématiques) qui dirige le projet. De leur côté, les entreprises créent l'AFTEL (Association Française des Fournisseurs de Services Télématiques). Les liaisons distantes sont établies via le réseau Transpac par le numéro d'accès 612 34 56. La toute première messagerie, uniquement par boîtes aux lettres, est baptisée M3V (surnommée "Bidulette" par ses fans). On peut y échanger des messages privés, ou par l'intermédiaire de groupes de discussion thématiques. À l'époque, la DACT et les fournisseurs de services pensent qu'il ne s'agit que d'un gadget ludique : pour eux, l'avenir de la télématique réside dans l'information, et non la communication. Il est même question de supprimer cette messagerie. Mais l'AATEL se bat pour la conserver et démontrer qu'elle est une motivation primordiale des utilisateurs, ce que confirmera le développement de la télématique grand public en France. C'est seulement fin 1982 qu'apparaît le premier Minitel. L'expérience est définitivement arrêtée au printemps 1984. Expérience Gretel À l'hiver 1981, les Dernières Nouvelles d'Alsace lancent le service expérimental Gretel sur un quartier pilote à Strasbourg. L'expérience débute avec 80 de foyers, puis est progressivement étendue. Les premiers services proposés sont des consultations des actualités, des programmes de télévision et de cinéma, et de la météo, ainsi que quelques jeux. On trouve aussi un service de messagerie électronique de type courriel avec une notion de boites aux lettres. Mais ce qui fait exploser le succès de l'expérience est le lancement en 1982 du premier service de messagerie instantanée, principe découvert à la suite d'un piratage. Ce nouveau service représente très rapidement jusque 85% du trafic. L'ancêtre des messageries Minitel et du tchat est alors né. Lancement commercial Lancé en France en 1982 par les PTT (aujourd'hui La Poste et Orange, entreprise publique pour la Poste, entreprise privée dont l'État français est actionnaire à hauteur de 27% pour Orange), le Minitel permet d'accéder à des services en ligne dont les plus populaires sont :
L'État français, par le ministère des PTT, a fortement encouragé le développement du Minitel. Les PTT ont ainsi distribué gratuitement les terminaux (des terminaux plus évolués ont ensuite été vendus ou loués). Cette décision était motivée par les économies de fabrication, de distribution et de recyclage de millions d'annuaires papier chaque année. Ainsi, les foyers équipés de Minitel ne recevaient plus que les pages jaunes, au lieu des pages blanches et des pages jaunes. Ce modèle économique, inventé pour le Minitel et consistant à subventionner le terminal par le prix du service, a été fortement critiqué à l'époque par la presse. Il a depuis été repris pour les services de téléphonie mobile. Seul le 3618 ou service MIAMI (service de communication de Minitel à Minitel) reste en service au-delà du 30 juin 2012. En effet, ce service ne dépend pas du même réseau support. Services télématiques Le Minitel (programme Télétel) revint à plus de huit milliards de francs en équipements de terminaux avec une durée de vie estimée de huit ans pour les Minitel. Pendant le même laps de temps, le chiffre d'affaires des services télématiques atteint les 3,5 milliards de francs et les économies de papier atteignirent 500 millions de francs par an. En 1985, le million de Minitel en service est atteint en France ainsi que le million d'heures de communications de services par mois. Au début des années 1990, le Minitel équipait 6,5 millions foyers. Il dépassait de loin le nombre d'utilisateurs du réseau CompuServe, qui offrait en Amérique du Nord des services semblables, et plus encore de Prodigy qui lui ressemblait davantage parce qu'utilisant le code Vidéotex, raison pour laquelle dès la fin des 1980, les Américains s'intéressèrent de très près au réseau Vidéotex français. À un moment où les Français s'interrogeaient sur l'avenir du Minitel, les agences financières de Wall Street notaient déjà le formidable bénéfice à attendre d'un tel programme. C'est pourquoi le futur vice-président Al Gore envoya un jeune homme, David Lytel, enquêter non sur les techniques utilisées mais sur les contenus des services offerts. Ce rapport fut à la source du discours sur "les autoroutes de l'information" prononcé par Al Gore en juillet 1994. Le réseau Télétel du Minitel comportait au départ deux types de facturation : 3613 (communication payée par le service) et 3614 (communication payée par l'usager, 20 francs (3,05 euros) par heure environ, pas de rémunération du service). En février 1984 fut créé le système kiosque avec le 3615. La rémunération du service est 60 francs (9,15 euros) par heure environ, payés par l'usager, dont 40 FF (6,10 euros) pour le service et 20 FF (3,05 euros) pour France Télécom, système de "taxation arrière" souhaité par l'industrie de la presse pour rendre son contenu payant. Ces numéros courts à quatre chiffres ont remplacé les numéros initiaux, au gré de l'évolution du plan de numérotation de l'opérateur historique :
L'annuaire électronique 3611 a été progressivement remplacé par l'annuaire Internet, avec les sites www.pagesblanches.fr et www.pagesjaunes.fr (vendu en 2006 à l'Américain KKR). Le succès de l'annuaire électronique était tel que France Télécom a pris du retard sur son annuaire Internet. Les serveurs (numéros de téléphone) auxquels on se connectait avec un Minitel étaient appelés des services Télétel. C'était en effet des passerelles vers le réseau Télétel, basé sur Transpac, qui permettait de mettre en relation les Minitel avec les serveurs des prestataires de service. En marge de ces services Télétel, il était tout à fait possible de composer des numéros classiques à 8 (puis 10) chiffres, que ce soit pour se connecter à un autre Minitel, "retourné", ou pour accéder à des serveurs "RTC" directement connectés sur le réseau téléphonique commuté, donc non surtaxés. Une communauté de passionnés fréquentait ainsi régulièrement ces micro-serveurs Minitel similaires (en plus accessibles) aux serveurs BBS qui se développaient aux États-Unis et ailleurs. À l'échelle locale, des collectivités proposaient également de tels serveurs Minitel à accès direct. Aujourd'hui encore, de nombreux systèmes de télégestion utilisent ce système, aussi bien en appel entrant (visualisation de données et d'événements ou émission d'ordres) qu'en appel sortant (télé-alarme). Impact environnemental et démantèlement En 2004, un article de ZDNet déclare que "l'opérateur historique" cède à titre gracieux" les Minitel de première génération à ses clients. Pour les associations écologistes, France Télécom se défausse de ses responsabilités en matière de recyclage des déchets. Ce que dément l'opérateur. La même année, un article du site Web Brest-ouVert estime que "par un tour de passe-passe France Télécom s'apprête à se débarrasser de ces millions de Minitel de la première génération, en fin de vie, que la réglementation l'obligerait bientôt à collecter puis à recycler". Dans un souci de préservation de l'environnement, Orange a mis en place un dispositif de collecte et de recyclage des Minitel. C'est à Toulouse que sont démantelés les Minitel collectés par France Télécom. Conséquences d'Internet Dans les années 1980, jusqu'à la fin des années 1990, le Minitel fut en concurrence directe avec Internet. D'une part, car, à cette époque, le taux d'équipement en Minitel, en France, était plus élevé qu'en accès internet et d'autre part car les connexions Internet grand public étaient à des débits bien plus faibles que les standards tels que l'ADSL popularisés dans les années 2000 (elles étaient du même ordre de grandeur que celui du Minitel jusqu'à la démocratisation de l'ADSL). En 1997, le Minitel rapportait six milliards de francs. Toutefois, Lionel Jospin, le premier ministre, a dit souhaiter favoriser Internet au détriment du Minitel. En 2003, le Minitel représentait 47% des revenus de l'ensemble Télétel, Audiotel, Internet. Plusieurs points clés différencient le Minitel et Internet :
En 2013, le projet Cervin a ressuscité des Minitel en leur permettant d'envoyer des tweets depuis une passerelle Arduino.
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