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Dossier : L'histoire de Dynabyte
(Article écrit par Damiano Gerli et extrait de Genesis Temple - janvier 2021)


Note : traduction par David Brunet.

Dans l'histoire du développement des jeux vidéo italiens, les jeux d'aventure "pointer et cliquer" pourraient être considérés, peut-être, comme la quintessence du genre. L'amour de la résolution d'énigmes et du rire aux blagues qui brisent le quatrième mur est peut-être plus fort que celui du football et du vin. Si les aventures de Sierra Entertainment ont eu du mal à trouver un marché en Italie, principalement parce que leurs titres étaient rarement traduits et assez difficiles à aborder pour un public qui ne connaissait pas vraiment l'anglais, les aventures de LucasArts ont connu un plus grand succès grâce à une commercialisation plus avisée (enfin, sauf pour Loom).

Leurs jeux se sont vendus à tellement d'exemplaires que LucasArts, à lui seul, semble avoir façonné le marché des jeux vidéo pour PC et Amiga pendant toutes les années 1990 et, probablement, même au-delà. L'amour indéfectible de l'Italie pour les jeux d'aventure a probablement quelque chose de pathologique. Ce n'est donc pas une coïncidence si les quelques éditeurs de logiciels qui ont prospéré dans les années 1990 ont concentré leurs efforts principalement sur les PC et les ordinateurs domestiques ; d'après mes recherches, il ne semble pas y avoir eu de jeux, fabriqués en Italie, pour les consoles Sega ou Nintendo avant bien plus tard (on ne compte guère qu'Idea Software qui a sorti un jeu pour Game Gear et Game Boy, nommé Gearworks).

Parmi les aventures pointer et cliquer sorties dans les années 1990, Nippon Safes Inc. et, surtout, The Big Red Adventure, sans être les meilleures aventures du moment, sont considérées comme deux titres solides, qui valent bien le temps du joueur ; elles sont même actuellement gérées par l'interpréteur ScummVM. J'ai retrouvé certaines des personnes impliquées dans le développement pour entendre leurs histoires et ce qui s'est passé avec ces deux aventures. Voici l'histoire de Dynabyte Software et tout commence à Gênes.

E-motion Software : ce premier pas est vraiment extraordinaire

S'il n'est pas facile de déterminer avec précision où l'histoire des jeux de Dynabyte a commencé, l'un des filons commence avec... E-motion.

E-Motion

E-motion Software est la société où le graphiste Massimo Magnasciutti et le programmeur Paolo Costabel se sont rencontrés pour la première fois, en 1991. Massimo Magnasciutti se souvint qu'il ne s'agissait pas vraiment d'une société de logiciels : tous deux travaillaient pour une société de logiciels et réussirent à faire travailler une petite équipe ensemble, en concevant un jeu vidéo qui répondait à leur intérêt pour le cyberpunk et le film Blade Runner. C'est ainsi que l'idée de Crimetown Depths commença à prendre lentement forme, initialement prévu pour Amiga, avec des conversions ultérieures pour Atari ST et PC.

Le scénario mettait en scène un mercenaire intergalactique anonyme qui était appelé par le Tyran Galactique pour résoudre les guerres en cours entre les gangs criminels sur la planète natale du dictateur. La jouabilité alternerait entre aventure/exploration (un peu comme Barbarian, disait Massimo Magnasciutti dans une entrevue à l'époque) et séquences de jeu de tir. Paolo Costabel raconta qu'ils réussirent à conclure un accord assez favorable pour deux jeux avec Mirrorsoft, un éditeur britannique, et qu'E-motion Software se transforma en une véritable société grâce à de nouveaux fonds et investisseurs. Ils étaient devenus une jeune équipe italienne travaillant soudainement aux côtés de vétérans du développement comme The Bitmap Brothers ; cela semblait presque trop beau pour être vrai.

Et, hélas, ça l'était.

Crimetown Depths Crimetown Depths

Crimetown Depths Crimetown Depths
Crimetown Depths

L'équipe n'avait que peu ou pas d'expérience en matière de développement, et cela - conclut Paolo Costabel - s'avéra être un problème majeur pour mener à bien un titre aussi ambitieux. Ils ne cessèrent d'ajouter des choses, "ce qui avait commencé comme un petit jeu de tir [...] devint une encyclopédie de fonctionnalités" se souvint Alessandro Tento dans une entrevue accordée au magazine Commodore Gazette. Il se rappela également s'être battu avec Massimo Magnasciutti sur la façon de concevoir la jouabilité. Alessandro Tento est peut-être un nom familier pour certains, il travailla ensuite chez Activision en tant que directeur artistique senior sur les séries Call Of Duty et Spyro, entre autres.

Selon Massimo Magnasciutti, Mirrorsoft leur confia un chef de projet qui ne semblait pas savoir ce qu'il faisait. Quand l'éditeur britannique découvrit que Crimetown Depths devait être publié sur trois disquettes, donc assez cher à produire, il laissa tomber E-motion Software et le jeu fut annulé. Même s'il ne vit jamais le jour, Crimetown Depths est toujours présent dans l'esprit de plusieurs fans d'Amiga car il était très prometteur. Massimo Magnasciutti indiqua que Crimetown Depths était "terminé à 90%", du moins graphiquement, mais qu'ils ne réussirent jamais à obtenir une jouabilité correcte. La démo, ou plutôt la bande-annonce, semble être la seule chose qui ait été achevée.

Crimetown Depths
Une entrevue avec Alessandro Tento d'E-Motion dans Commodore Gazette

La naissance de Dynabyte

Le deuxième filon narratif se trouve dans les rêves du jeune Christian Cantamessa. Passionné par le cinéma, les jeux de rôle sur plateau et les jeux vidéo, il rêvait de pouvoir créer une aventure en pointer et cliquer mettant en scène un voleur médiocre et malchanceux dans le style de Larry Laffer et du film d'animation Lupin. N'ayant aucune expérience dans le développement, son rêve commença à prendre forme le jour où il rencontra Massimo Magnasciutti. Le graphiste jeta un coup d'oeil à l'idée de Christian Cantamessa, après avoir impliqué également Paolo Costabel, les trois travaillèrent pour terminer une sorte de démo de l'aventure, appelée à l'époque Steve On The Crime Wave ("Sailing" fut ajouté plus tard). "La démo était si instable que nous avons dû l'enregistrer sur cassette VHS, elle reprenait en fait le sprite de Crimetown Depths", précisa Christian Cantamessa.

En septembre 1991, Christian Cantamessa, ainsi que l'ami de son père, Lovrano Canepa, et la journaliste de C+VG, Simone Crosignani, prirent l'avion pour le salon ECTS de Londres afin d'essayer de trouver un éditeur. L'ancien journaliste mentionna que si le travail de Massimo Magnasciutti était prometteur, il ne semblait pas encore y avoir de projet raisonnable : "C'était une époque différente, c'est certain, mais sans un véritable projet de jeu vidéo, il aurait été très difficile d'attirer un éditeur." Pendant ce salon, les trois utilisèrent le nom de Dynabyte Software pour la première fois. Dans l'article de CU Amiga (ci-dessous), le journaliste mentionna d'autres jeux de Dynabyte, ce que Christian Cantamessa expliqua : "Nous leur avons montré des images de Massimo Magnasciutti réalisées avec Deluxe Paint et nous avons créé des jeux sur place. Nous avons juste fait semblant de développer réellement plusieurs titres".

Dynabyte
Article de CU Amiga

N'ayant pas eu de chance à Londres, Christian Cantamessa décida de trouver des fonds parmi les amis de son père. Avec le nouvel investisseur Bruno Boz, ainsi que Lovrano Canepa et Christian Cantamessa senior, les trois créèrent la société Ludomedia. Paolo Costabel, Christan Cantamessa et Massimo Magnasciutti commencèrent à travailler sérieusement sur le projet, se souvint Christian Cantamessa : "nous avons évolué de l'idée de Steve Sailing On The Crime Wave vers une aventure qui, tout en présentant une intrigue similaire, permettait au joueur d'alterner entre trois personnages. Malheureusement, comme je n'avais aucune expérience dans la conception de jeux et que j'étais encore au lycée, on m'a rapidement dit que je ne pouvais plus travailler sur le jeu, mon père a quitté la société et j'ai fini par partir moi aussi."

Peu de temps après son départ, Marco Caprelli rejoignit Christian Cantamessa : il se souvint avoir rencontré les gars pour la première fois dans un magasin d'informatique à Gênes et, après s'être rendu à leur bureau, il fut embauché presque immédiatement. Le prototype fut ensuite retravaillé, Nippon Safes Inc. étant d'abord développé sur Amiga, puis sur PC, par une équipe de trois personnes : Massimo Magnasciutti comme concepteur graphique, Paolo Costabel pour la programmation et Marco Caprelli comme musicien. Ce dernier fait encore des cauchemars à propos du haut-parleur de PC utilisé pour la version DOS, qu'il considère comme "l'une des pires expériences de ma vie". Plusieurs personnes travaillèrent sur la version PC, parmi lesquelles Fabrizio Lagorio (de Trecision) qui se souvint avoir terminé 50% du code, puis avoir abandonné parce qu'il n'était plus payé.

Dynabyte

Dynabyte
Nippon Safe Inc.

Paolo Costabel m'informa qu'en plus de la jouabilité classique de pointer et cliquer, il s'inspira de son amour pour le Japon - ce qui devint évident à la lecture du manuel - d'où l'idée d'une aventure basée sur Tokyo, mettant en scène divers stéréotypes nationaux. L'histoire étant conçue pour se dérouler entre trois personnages différents et des arcs narratifs parallèles, il n'est pas facile de dire quelle part du projet original de Christian Cantamessa (qui n'apparaît pas au générique) fut conservée. Massimo Magnasciutti précisa que l'inspiration lui vint en jouant à Leisure Suit Larry III de Sierra. Pourtant, le projet s'avéra assez difficile à terminer, avec, apparemment, une bonne partie de l'aventure qui se retrouva sur la table de coupe parce que le développement prit du retard.

Massimo Magnasciutti pensa que la "vraie" version de Nippon Safes Inc. était celle de l'Amiga : il n'aima pas la conversion pour PC à cause des nombreuses restrictions graphiques qui rendirent le jeu plus fluide, il n'eut pas non plus d'affection pour la bande son ajoutée et qui était présente en permanence pendant le jeu. Marco Caprelli indiqua qu'il n'était pas fou de l'illustration de la boîte, pour lui il aurait été mieux de laisser Massimo Magnasciutti s'en occuper, afin de mieux représenter le style de l'aventure.

Dynabyte

Dynabyte
Nippon Safe Inc.

Outre les problèmes de développement, Nippon Safes Inc. connut également des problèmes d'édition, se souvint le producteur et PDG Bruno Boz. "Nous avions un accord avec un éditeur, avec une date de sortie fixée au 1er avril 1992. Nous avons payé nous-mêmes l'impression des boîtes, des manuels et des disquettes, puis l'éditeur a plié bagage et a disparu. Nous n'avions pas d'autre choix que de distribuer les jeux nous-mêmes : nous avions investi une énorme somme d'argent et nous étions tous paranoïaques quant à l'accueil du jeu."

Bien qu'il s'agissait d'un jeu pointer et cliquer relativement simple et court qui montrait les talents des gars de Dynabyte, Nippon Safes Inc. fut clairement le résultat d'un petit budget et d'un cycle de développement précipité. Néanmoins, en tant que premier jeu de la société, après plusieurs tentatives ratées, il offrait une expérience relativement exempte de bogues (même si les dialogues entre les personnages étaient limitées) ainsi qu'une interface relativement accessible. Heureusement pour le producteur, il fut bien accueilli par la presse nationale italienne - qui fut apparemment très surprise que le premier titre d'une société logicielle italienne puisse être décent - et connut un assez bon succès dans son pays d'origine, ce qui, à l'époque, signifiait qu'il ne s'était vendu qu'à un peu plus de mille exemplaires. Le marché était encore en proie au piratage.

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Publicité italienne pour Nippon Safes Inc. (distribuée par un éditeur inconnu "Trend").

Bizarrement, surtout pour 1992, Nippon Safes Inc. trouva un écho particulier dans les magazines internationaux. Paolo Costabel révéla qu'en voyant tout ce chaleureux accueil, ils regrettèrent vite de n'avoir fait pratiquement aucune publicité : le jeu fut traduit mais, également à cause des problèmes avec l'éditeur, il ne sortit jamais officiellement en dehors de l'Italie. On ne sait toujours pas comment le jeu fut distribué en Europe, puisque - pour autant que l'on s'en souvienne - aucun contrat d'édition international ne fut jamais signé par Dynabyte. En France, le jeu fut apparemment distribué par Ubi Soft, mais aucun de mes contacts ne se souvint avoir eu un contrat d'édition avec eux, ni avec aucun autre éditeur d'ailleurs. Cela pourrait peut-être avoir un rapport avec leurs précédentes tentatives d'édition, mais, une fois encore, aucune des personnes interrogées par mes soins ne semble être en mesure de confirmer quoi que ce soit à ce stade.

Massimo Magnasciutti intervint également en disant que les programmeurs ne touchèrent jamais un centime de toutes les copies vendues.

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Test de Nippon Safes Inc.

Ramifications

En 1993, Dynabyte avait un projet visant à publier un titre développé par une équipe de Palerme (Sicile), qui n'avait pratiquement aucun rapport avec tout ce qu'ils avaient publié jusqu'alors. Comme le rappela Massimo Magnasciutti, "ils sont venus nous voir avec un produit déjà fini et nous ont demandé si nous pouvions les aider à le distribuer". Ce programme nommé Striker Occulta Lapis fut très rarement mentionné, même dans son pays d'origine, car il ne s'agissait pas vraiment d'un jeu vidéo.

Développé pour répondre à la demande croissante de produits multimédias, il fonctionnait comme une sorte de bande dessinée interactive sur CD-ROM : le joueur devait simplement cliquer pour faire avancer l'histoire. En 1993, peu de gens en Italie possédaient un lecteur de CD, il était même rare de voir une chaîne stéréo équipée d'un lecteur de CD ; à la grande surprise de tous, le succès fut limité. Massimo Magnasciutti lui-même n'était pas tout à fait sûr que Dynabyte distribua effectivement ce titre en magasin, Marco Caprelli s'en souvint à peine également et affirma qu'il ne fut probablement jamais vendu. Bruno Boz se souvint que des copies furent imprimées mais qu'elles ne furent jamais distribuées.

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Striker Occulta Lapis

Après Nippon Safes Inc. et les changements d'organisation, Dynabyte essaya d'élargir encore son catalogue en travaillant sur deux expériences radicalement différentes. La première était un titre de combat en un contre un, Tube Warriors, développé exclusivement pour les Amiga AGA. Là encore, le jeu était basé au Japon et tous les combats se déroulaient dans le métro (comme le titre l'indique) : le joueur devait vaincre tous les chefs des autres gangs rivaux afin de s'emparer de leur territoire.

Comme dans Fatal Fury, les joueurs pouvaient alterner entre des combats au premier plan et en arrière-plan. Paolo Costabel m'affirma que ce n'était pas une grande idée, car le genre "combat" n'était pas quelque chose qu'ils connaissaient et, graphiquement, cela n'utilisait pas vraiment la puissance des Amiga AGA. Bruno Boz m'indiqua que le jeu sembla ne jamais avoir fonctionné et ne fut jamais publié, seules quelques copies de test furent produites. Depuis la mise en ligne de cet article, plusieurs lecteurs me contactèrent pour me dire que Tube Warriors fut bel et bien publié dans leur pays, mais quelle société le publia et ce qui se passa exactement n'est toujours pas clair. Je ferai une mise à jour si quelque chose de plus définitif devait apparaître.

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Tube Warriors

L'autre titre de 1994, réellement sorti, était Late Night Sexy TV Show, développé par Massimo Magnasciutti et Maurizio Ghirelli, même si Massimo Magnasciutti en parlait comme si c'était sa création. Les lecteurs de ce blog le savent peut-être, j'ai un penchant pour les titres bizarres et obscurs, alors croyez-moi quand je dis que j'aurais franchement du mal à trouver un titre plus bizarre à sortir, non seulement de Dynabyte, mais probablement de toute l'Italie dans les années 1990.

Late Night Sexy TV Show était, à la base, un jeu de questions-réponses, présenté par la sexy animatrice Vera Cyntex, mais comportant également des éléments de jeu de simulation de rencontre. Il était présenté aux magazines comme ayant été développé sur une station Silicon Graphics, que Dynabyte avait en fait acquise à ce moment-là mais, pour divers problèmes techniques, elle ne fut jamais utilisée pour le développement dudit quiz sexy, ni d'aucun autre jeu, pour autant que j'aie pu le découvrir. Marco Caprelli se souvint qu'il s'agissait plutôt d'un jouet pour le bureau, et Giorgio Sommariva ajouta : "il était utilisé principalement pour s'amuser, pour autant que je sache, nous ne l'avons jamais utilisé pour le développement d'un quelconque jeu, même si cette machine coûtait une fortune !" Massimo Magnasciutti lui-même confirma :
"Late Night a été programmé et conçu avec une copie pirate de 3D Studio Max sur un PC 486. Je n'avais même pas le manuel du programme, j'ai donc dû apprendre en multipliant les essais et les erreurs !"
De plus, dans une avant-première du magazine italien The Games Machine, Lovrano Canepa parla de l'existence d'un algorithme (reACTOR) qui gérait les émotions et les réactions du personnage en temps réel.

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Late Night Sexy TV Show

Massimo Magnasciutti raconta que l'idée de développer Late Night Sexy TV Show naquit d'une réunion au cours de laquelle ils arrivèrent rapidement à la conclusion que le seul moyen infaillible de vendre un jeu en Italie serait de le centrer sur le sexe. Massimo Magnasciutti commença donc à y travailler à plein temps, avec pour objectif de "parodier ces stupides jeux télévisés" comme La Roue De La Fortune. Le joueur (ou les joueurs, jusqu'à quatre en simultané) créait un candidat à l'aide d'un simple générateur de personnages, puis participait à l'émission pour répondre à des questions typiques des jeux télévisés. En répondant correctement, le joueur recevait de l'argent, qu'il pouvait utiliser pour faire avancer sa carrière, modifier son corps (avec des options telles que la réduction de la taille du pénis ou une défloration chirurgicale) ou apprendre à connaître son partenaire, l'un des autres concurrents.

Massimo Magnasciutti, apparemment, aima vraiment l'idée de Leisure Suit Larry, puisque pour gagner, il fallait devenir le partenaire idéal de la personne choisie, et donc faire un tour ensemble dans la machine de réalité virtuelle "Orgasmatic". Il était également question de "fluide cosmosensuel", mais franchement, j'ai commencé à m'y perdre un peu. En écrivant le scénario, le concepteur décida de ne pas se freiner et de tout prévoir pour voir ce qu'il se passera. Ceci fut encore renforcé par la lecture du manuel de 30 pages, entièrement écrit par Massimo Magnasciutti, maquillé pour ressembler à un magazine à scandale, qui prit probablement plus de temps à écrire que le jeu lui-même.

Avec seulement cinq pages consacrées au fonctionnement du jeu, le reste du magazine partageait l'humour très années 1990 de Late Night : des annonces personnelles du type "vous cherchez à vous amuser ? Habillez-vous en poulet et allez à la gare centrale à 4 heures du matin", des nouvelles sur le thon en boîte qui fait changer de sexe, de fausses entrevues de scientifiques et de cinglés ainsi que, naturellement, des blagues offensantes sur tout ce qui existe sous le soleil.

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Le magazine dans Light Night

En ce qui concerne les ventes, Massimo Magnasciutti rappella, qu'à l'époque, l'important était d'essayer de rester au sommet du marché : "même si votre jeu n'était pas terrible, il était important de le sortir. La quantité primait sur la qualité". Late Night Sexy TV Show ne se vendit pas très bien, comme on pouvait s'y attendre, même si la plupart des personnes interrogées pour cet article semblaient en avoir, sans surprise peut-être, un souvenir assez vif.

Bien que Late Night Sexy TV Show termina rapidement dans le bac à ordures, il reçut des critiques étonnamment enthousiastes à l'époque, The Games Machine lui donnant une note de 89 sur 100 (mieux que Nippon Safes Inc. !) :
"Bien qu'au début ce jeu semblait ne pas avoir de sens [...] je le recommande vivement, non seulement il est très amusant, mais il est doté d'une grande durée de vie, devenant de plus en plus intriguant et excitant !"
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La boîte de Late Night Sexy TV Show

La jouabilité de Late Night Sexy TV Show penchait résolument du côté de la bizarrerie, et l'écriture de Massimo Magnasciutti partait un peu dans tous les sens, la jouabilité étant par exemple interrompue par des séquences montrant un couple en train de se disputer devant la télévision. Il tentait également d'inclure un commentaire social, mais moins on en dit, mieux c'est.

Ce fut certainement l'une des expériences les plus originales que j'ai vécues ces dernières années, surtout pour un titre commercial. Un jour, je m'y replongerai, ne serait-ce que pour voir plus de ces conversations bizarres entre les personnages. Massimo Magnasciutti me donna également le feu vert pour téléverser le jeu sur archive.org, donc si certains de mes lecteurs ont envie de l'essayer aussi, voici le lien. Malheureusement, uniquement en italien.

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Avant-première de Late Night Sexy TV dans The Games Machine

Pour en revenir à leur premier titre, et seul véritable succès, ainsi qu'à leur tentative de se diversifier sans que personne s'en aperçoive vraiment, Marco Caprelli se souvint que les gars n'étaient pas satisfaits de la façon dont la société était organisée. Ils voulaient également éviter de répéter les erreurs qui conduisirent Dynabyte à presque fermer ses portes alors qu'ils travaillaient sur Nippon Safes Inc. Ils fusionnèrent donc Dynabyte avec une nouvelle société, Ludomedia, tout en conservant la marque Dynabyte.

La nouvelle société comprenait plusieurs associés (dont Marco Caprelli), Paolo Costabel étant le représentant légal et Bruno Boz le PDG. Marco Caprelli, en recherchant des documents pour l'article, se souvint que le logo de Ludomedia fut conçu par sa petite amie de l'époque, ce qui fut assurément un élément obscur de leur histoire.

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Logos de Dynabyte

Dynabyte s'internationalise

Massimo Magnasciutti quitta Dynabyte peu après la sortie de Late Night Sexy TV Show, pour trouver du travail - plus tard - dans le monde des jeux mobiles. Il n'eut qu'un aperçu de ce qui fut le plus grand succès de Dynabyte...

The Big Red Adventure, développé comme une suite directe de Nippon Safes Inc., vit les trois protagonistes revenir pour une aventure plus longue et plus complexe. Giorgio Sommariva se souvint avoir rejoint l'équipe en 1994 et avoir immédiatement travaillé sur les graphismes de ce titre. Il mentionna également quatre semaines de travail acharné afin de terminer l'aventure à temps, la dernière partie du jeu se terminant un peu précipitamment. Dynabyte voulait surtout s'assurer de ne pas répéter les mêmes erreurs d'édition qui avaient conduit aux mauvaises ventes de Nippon Safes Inc.

L'équipe se rendit au salon ECTS de Londres pour présenter le jeu, Virgin faisant partie des différentes sociétés d'édition intéressées, se souvint Marco Caprelli, mais ce fut finalement Core Design qui les convaincus. Paolo Costabel lui-même se déplaça à Derby (Angleterre) pour montrer une démo du jeu à cette société afin de finaliser l'accord d'édition. Il déclara que l'équipe travailla sans relâche pendant 72 heures pour éliminer tous les bogues, mais que cela en valait la peine puisque l'accord fut finalement conclu : Core Design vint à Gênes, avec son producteur Adrian Smith, pour signer le contrat.

Marco Caprelli se souvint avoir parlé avec Adrian Smith, se plaignant de l'absence de protagonistes féminins dans les jeux vidéo, et le producteur lui révéla qu'ils travaillaient alors sur Tomb Raider.

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The Big Red Adventure

Intitulé à l'origine "Operation Matrioska", Marco Caprelli se souvint que ce fut Core Design qui décida de changer le titre en "The Big Red Adventure" pour qu'il sonne plus "européen". L'aventure fut distribuée sur tout le continent ; même s'il s'agissait de la suite d'un jeu qui n'était encore disponible qu'en Italie, il se souvint que, apparemment, l'éditeur ne s'inquiéta pas de la nécessité de rééditer l'original.

Giorgio Sommariva travailla sur les dialogues et les descriptions : "Quand j'avais fini avec les graphiques, je faisais des tests ou j'écrivais. Paolo Costabel avait écrit un script (NDLR : appelé Parallaction) qui téléchargeait le texte du jeu que nous compilions avec l'éditeur DOS ordinaire. Parfois, nous ajoutions des choses très aléatoires, comme des références à l'équipe de football de la Sampdoria ou même des références à d'anciennes petites amies !"

Le fils de Bruno Boz, Alberto, travaillait également chez Dynabyte à l'époque, se souvint-il : "Core Design avait une équipe complète de testeurs et nous envoyait des télécopies remplies de bogues à corriger, alors que nous n'avions en réalité qu'un seul programmeur. Ils étaient des professionnels, nous étions encore une bande de jeunes adultes, qui ne prenaient pas vraiment les choses au sérieux. À l'exception de mon père, tout le monde avait moins de 30 ans et n'était pas très engagé à travailler pour terminer un projet."

Dynabyte

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The Big Red Adventure

The Big Red Adventure était un jeu légèrement meilleur que son prédécesseur, montrant un côté plus mature de Dynabyte et avait également moins de bogues et de problèmes, même si l'aventure disposait toujours d'animations assez limitées et, encore une fois, des conversations entre les personnages assez succinctes. The Games Machine lui octroya une note de 87 sur 100, soulignant que l'équipe était "presque au même niveau que LucasArts et Sierra pour la qualité de leurs aventures".

Malheureusement, même si l'accord d'édition avec Core Design permit à The Big Red Adveture de se vendre correctement et, au moins, de faire un retour sur investissement, Marco Caprelli affirma que l'éditeur anglais n'avait clairement aucune intention de retravailler avec Dynabyte. Bruno Boz indiqua que la communication avec Core Design, après la sortie du jeu, était pour le moins confuse et que, même si le contrat impliquait des commissions sur les ventes, Dynabyte ne vit jamais un centime après le premier paiement. "Nous avons pensé à appeler nos avocats puisque les chiffres de vente ne semblaient pas correspondre, mais un procès international aurait fini par coûter plus cher que ce qu'il valait."

Apparemment, Core Design n'était pas intéressé par leur projet suivant car il semblait trop "enfantin". En 1995, l'ère de la PlayStation battait déjà son plein et tout, du jour au lendemain, devint "avant-gardiste". The Big Red Adventure ne fit peut-être pas de Dynabyte un nom connu de tous, mais, en revanche, beaucoup s'en souviennent encore avec émotion et il reste l'un des jeux d'aventure les plus célèbres d'Italie.

Dynabyte
La boîte de The Big Red Adventure

La Tequila fait Boom Boom : la fin de Dynabyte

Dynabyte commença à travailler sur son projet suivant avant même de sortir The Big Red Adventure. Il s'agissait d'une autre aventure de type pointer et cliquer, partageant le même moteur que son prédécesseur, mais avec une interface simplifiée et des graphismes de dessins animés dignes de Disney. Bien que Tequila & Boom-Boom, sorti en 1995, ait pu ressembler à un dessin animé, Paolo Costabel indiqua qu'il voulait intégrer le maximum de Sergio Leone et de western spaghetti dans l'intrigue et les personnages du jeu.

Marco Caprelli souligna que leur objectif était essentiellement de faire une version cartoon d'un film de Bud Spencer et Terence Hill, d'où l'allure des deux principaux protagonistes. Giorgio Sommariva se souvint avoir travaillé un peu sur l'aventure, juste avant de quitter Dynabyte, bien qu'il ne fut pas crédité dans le produit fini. La plupart des graphismes furent dessinés par l'artiste Alessandro Belli et le concepteur de personnages Alessandro Barbucci, puis numérisés, à l'instar de ce que LucasArts faisait avec The Curse Of Monkey Island.

Dynabyte Dynabyte

Dynabyte Dynabyte
Tequila & Boom-Boom

Paolo Costabel en parlait encore comme de l'un des meilleurs titres de Dynabyte mais, bizarrement, ce fut probablement leur aventure la moins connue, même en Italie. La faute en revint, une fois de plus, à l'éditeur : Marco Caprelli précisa que Dynabyte avait conclu un accord d'édition avec SACIS. Il s'agissait d'une société qui, à l'époque, semblait avoir le vent en poupe, puisqu'elle distribuait également des titres d'Ubi Soft comme Rayman. Malheureusement, SACIS s'avéra être le mauvais choix : elle était financée par la RAI, la télévision nationale italienne, et n'avait apparemment aucune connaissance du marché du jeu vidéo. Marco Caprelli ajouta qu'il était toujours persuadé que Dynabyte avait une meilleure connaissance du marché que SACIS elle-même !

Bruno Boz indiqua que SACIS mit le paquet pour Tequila & Boom-Boom (sans surprise, ils utilisaient des fonds publics !), allant même jusqu'à louer un bel endroit à Ravello - près de Gênes - pour révéler le titre à la presse. Mais, malgré tout l'argent dépensé par SACIS pour la présentation, à l'approche de la date de sortie, ils disparurent apparemment dans la nature. "Je ne sais toujours pas ce qu'il s'est passé exactement, peut-être que l'arrivée au pouvoir de Silvio Berlusconi y est pour quelque chose", se demanda Bruno Boz... "Pendant près de quatre mois, je n'eus pas de nouvelles d'eux. Nous manquions cruellement de fonds pour poursuivre le développement."

Tequila & Boom-Boom réussit miraculeusement à sortir en Italie, mais ne se vendit jamais bien, et ce fut le dernier titre commercialisé par Dynabyte. SACIS devait initialement distribuer deux autres titres que Dynabyte développait en même temps que Tequila & Boom-Boom, mais cela ne se produisit jamais.

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La boîte de Tequila & Boom-Boom

Parallèlement au développement de Tequila & Boom-Boom, Giorgio Sommariva mentionna que l'équipe travaillait également sur Blood & Lace. Il s'agissait d'un projet radicalement différent des habituelles aventures cartoonesques de Dynabyte. Depuis qu'il avait travaillé sur The Big Red Adventure, Marco Caprelli avait envie d'écrire et de développer un jeu mettant en scène un protagoniste féminin. Pour Blood & Lace, il choisit la comtesse Barbara Cagliostro. Bruno Boz s'en amusa et commenta : "elle était en fait l'équivalent vidéoludique de sa petite amie de l'époque".

Pourtant, à l'origine, il était prévu qu'il s'agisse d'une énième aventure en 2D de type pointer et cliquer, avec des événements rapides, des graphismes dessinés à la main, utilisant une version améliorée du moteur de Tequila & Boom-Boom. Mais en fait, Blood & Lace présentait une histoire d'horreur gothique, qui se déroulait entre Paris et l'Italie. La référence au film de Philip S. Gilbert de 1971 dans son titre ne fut peut-être pas une coïncidence.

Voici comment se présentait le titre à l'époque où l'équipe de base de Dynabyte travaillait encore dessus (le générique de la vidéo présente Caprelli et Costabel) :



Outre Blood & Lace, l'autre projet que SACIS avait accepté de distribuer se nommait "Roma". Il s'agissait d'un jeu d'aventure en 2D qui, comme Bruno Boz le mentionna, ne dépassa pas le stade de la conception de quelques arrière-plans.

Dynabyte
Marco Caprelli et Fabrizio Ferrara de SACIS présentant Blood & Lace
dans le magazine russe Game.EXE (1995 ?).


En 1996, Dynabyte commença également à travailler sur la conversion Amiga de The Big Red Adventure, à la demande des fans, même si cette gamme d'ordinateurs de Commodore était alors à bout de souffle. Apparemment, les conversions A1200 et CD32 faisaient partie de l'accord initial de publication avec Core Design, mais cela échoua vite parce que le marché se rétrécissait à vue d'oeil. Du coup, la version Amiga fut publiée par une société anglaise de vente par correspondance, Power Computing.

Malheureusement, alors que la société italienne était en grande difficulté, des controverses entre Bruno Boz et le reste de l'équipe conduisirent à une scission, avec Paolo Costabel et Marco Caprelli d'un côté, et Bruno Boz de l'autre. Bruno Boz se souvint que le schisme se produisit juste après que les problèmes avec SACIS aient commencé à peser lourdement sur les finances de la société : l'équipe principale voulait continuer à travailler avec cet éditeur, tandis que Bruno Boz et les autres décidèrent que cela n'en valait pas la peine.

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Version Amiga de The Big Red Adventure

Après la sortie de Tequila & Boom-Boom, Marco Caprelli indiqua qu'à la fin, Paolo Costabel ayant reçu une offre pour travailler sur le film Final Fantasy avec Squaresoft, ainsi que Riccardo Scarsi et Alessandro Belli ayant quitté l'entreprise, il se retrouva seul dans l'équipe.

Il ne resta pas à faire semblant que la compagnie soit toujours en activité. Ludomedia cessa alors ses activités en 1997, même si le logo Dynabyte fut absorbé par Virtual Edge, la société multimédia de Bruno Boz, il n'y avait pas de véritable équipe derrière. La société Virtual Edge se débrouilla tant bien que mal pendant quelques années, publiant de petits titres pour des magazines de jeux et des logiciels ludo-éducatifs, puis elle ferma ses portes en 2000.

Même si l'équipe se sépara, Marco Caprelli n'abandonna pas vraiment l'idée de Blood & Lace. Il continua à travailler sur le jeu avec une autre équipe, transformant l'aventure originale en 2D en une sorte de projet 2,5D avec des personnages dessinés en 2D qui se déplaçaient dans des environnements en 3D. Plus tard, il fut recruté par la maison d'édition Giunti Editore pour commander une équipe chargée de travailler sur des produits multimédias et des jeux. Naturellement, Blood & Lace fut la première idée qu'il présenta. Ils donnèrent le feu vert et Marco Caprelli recommença à travailler sur l'aventure de la comtesse Cagliostro, pour la terminer plusieurs années plus tard, en 2001.

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Dessins pour Blood & Lace

Alors que l'équipe de Giunti Multimedia Entertainment était en train de développer le jeu, Dario Pelella (un ancien développeur de Trecision) suggéra de transformer à nouveau le projet en une aventure entièrement en 3D, avec un moteur développé par Dario Pelella lui-même. Marco Caprelli indiqua que l'inspiration était, apparemment, Tomb Raider, même si le jeu était plus proche du clone moyen de Resident Evil du début des années 2000. Au final, le développement du jeu prit deux années complètes, l'équipe de Giunti Multimedia Entertainment ayant été chargée de tout reconstruire à partir de zéro, en ne conservant que l'histoire de la version de 1996.

Lorsqu'on lui demanda s'il était satisfait du résultat de Blood & Lace, après cinq ans de développement, il répondit par des sentiments mitigés.

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Blood & Lace

L'équipe était constamment distraite par le fait de devoir jongler avec trop de choses pour son employeur, sans jamais avoir le temps de se focaliser entièrement au projet. En outre, Marco Caprelli conclut qu'ils avaient vraiment besoin d'une gestion plus directe : Giunti Multimedia Entertainment semblait se contenter de laisser la jeune équipe faire son travail, la laissant généralement travailler seule sur divers projets, sans jamais prendre la peine de vérifier ce qu'elle faisait réellement.

Lorsque Blood & Lace fut terminé et finalement commercialisé, Marco Caprelli avait déjà quitté l'équipe, qui fut dissoute peu après, en raison de divers problèmes de communication entre Giunti et les programmeurs eux-mêmes. À la surprise générale, le jeu, sans doute parce qu'il venait d'un éditeur plus habitué à vendre des livres que des jeux vidéo, passa presque inaperçu.

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La boîte de Blood & Lace au début de 1995, alors qu'il était censé être publié par SACIS.

Post mortem du Dynabyte : The Killing Tool

En parlant de Dynabyte, Marco Caprelli se souvint d'un titre qui partageait la fonctionnalité de jeu multiplan de Tube Warriors. Il s'agissait d'un jeu de plates-formes cyberpunk sur lequel Marco Caprelli et Paolo Costabel avaient commencé à travailler vers 1994. "Nous avons contacté le talentueux graphiste local Talexi pour qu'il s'occupe de l'aspect artistique", mentionna Marco Caprelli. Alessandro "Talexi" Taini confirma qu'il travaillait sur l'aspect artistique avec son ami et artiste Bjorn Giordano et, avec Dynabyte, ils réussirent à compléter un portefeuille de compétences (portfolio) qu'ils envoyèrent à Sony UK. "Nous avons convenu de nous revoir après l'été afin de vérifier s'ils étaient intéressés", mentionna Bjorn Giordano.

Mais, à la surprise générale, en septembre, Alessandro Taini et Bjorn Giordano se présentèrent aux bureaux de Dynabyte et les trouvèrent fermés, pour de bon apparemment, sans personne pour les accueillir. "Nous ne nous en étions pas rendus compte à l'époque, mais l'entreprise était déjà sur le déclin et ils ont simplement fermé boutique, c'était en 1996".

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Illustration de la boîte de The Killing Tool par Talexi

Les deux hommes décidèrent cependant de ne pas abandonner un projet sur lequel ils avaient travaillé si dur, et décidèrent d'embarquer dans un avion pour Londres afin de demander directement à Sony UK ce qu'il était advenu de leur portefeuille de compétences. Bjorn Giordano se rappela s'être présenté à l'improviste dans les bureaux de Sony à Londres et, après quelques minutes d'attente, avoir été accueilli par Martin Alltime, à l'époque producteur pour Sony Europe. "Je me souviens encore de son visage au moment où nous lui avons dit que nous étions les gars de The Killing Tool. Il a dit qu'il nous cherchait depuis des semaines, mais que personne ne répondait aux appels téléphoniques et aux télécopies". Apparemment, Sony était plus que prêt à financer une démo, ils étaient intéressés par le projet. Dynabyte avait même perdu cette toute dernière chance.

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Bjorn Giordano et Alessandro Taini se souvinrent avoir passé des semaines à Londres, à faire le tour de plusieurs équipes de développement, dont Psygnosis. "Malgré leur intérêt pour notre projet et notre direction artistique, personne ne semblait disponible pour développer un moteur 3D, ils étaient tous débordés. À l'époque, il n'était pas vraiment possible de recycler un ancien moteur graphique, car il y en avait trop peu ! J'ai même obtenu le numéro de téléphone du président de Sony en Italie, mais il m'a dit qu'il ne savait pas du tout comment il pouvait nous aider."

Finalement, les deux hommes abandonnèrent. Bjorn Giordano rentra chez lui, mais Alessandro Taini aima ce qu'il vit dans l'industrie et décida d'y rester. Depuis, il travailla comme directeur artistique pour plusieurs jeux de Ninja Theory, de Heavenly Sword à Enslaved: Odyssey To The West. Il raconta que The Killing Tool fut la raison principale pour laquelle il finit par s'impliquer dans les jeux vidéo.

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L'histoire de Dynabyte ressemble à une autre histoire typique du développement de jeux vidéo en Italie dans les années 1990 : peu d'argent, peu de capitaux, des problèmes de gestion et encore plus de problèmes de distribution et d'édition. Pourtant, l'équipe finit par prendre des décisions très intelligentes, notamment en concluant un accord de distribution avec Core Design et en réussissant à publier un titre important comme The Big Red Adventure. Peut-être que si Core Design était resté avec Dynabyte, cette histoire aurait eu une issue très différente, le studio devenant une réussite comme Milestone.

Lorsque je demandai à Paolo Costabel s'il était satisfait de la tournure des événements, il me répondit : "Je pense que, pour la plupart, les jeux ont plutôt bien marché. Je suis particulièrement fier des aventures que j'ai contribué à créer, avec le reste des gars. J'ai découvert des années plus tard qu'elles figuraient même dans quelques livres sur les aventures pointer et cliquer. Des personnes du monde entier y jouent toujours et les apprécient et c'est un sentiment formidable".

Marco Caprelli est également intervenu, affirmant que l'équipe fit de son mieux pour s'adapter à un marché restreint et que ses talents réussirent à briller malgré tous les problèmes. Massimo Magnasciutti fut plus direct, comme il en avait l'habitude : "Ils voulaient que nous soyons l'Ubi Soft italien, alors qu'ils ne désiraient même pas nous payer une pizza si nous faisions des heures supplémentaires la nuit". Bruno Boz se remémore encore de cette époque avec affection et garde toutes les oeuvres de Tequila & Boom-Boom accroché aux murs de son studio.

Même si l'on n'est pas fan de leurs produits, il est remarquable de constater que Dynabyte survécut à toutes les vicissitudes de l'édition et, entre-temps, contribua à former des professionnels qui jouent toujours un rôle essentiel dans le monde du jeu vidéo d'aujourd'hui, tout en lançant la carrière d'artistes importants comme Talexi. Dynabyte est peut-être mort et enterré, un nom qui n'est familier qu'aux historiens du jeu vidéo et aux fanatiques d'aventure, mais son héritage est bien vivant.

Où sont-ils maintenant ?

Marco Caprelli, après avoir quitté Giunti Multimedia, devint responsable de marque pour Ubi Soft et travailla, entre autres, sur la commercialisation en Italie des séries Assassin's Creed et Splinter Cell.

Paolo Costabel, après avoir travaillé sur les films Hollow Man et Final Fantasy: Spirits Within en tant que directeur technique, est désormais employé chez Sony Santa Monica, où il travaille actuellement sur la série God Of War.

Christian Cantamessa, après un bref passage chez Trecision, passa chez Ubi Soft puis chez Rockstar où il fut le principal concepteur de Manhunt et de Red Dead Redemption.

Massimo Magnasciutti travaille toujours comme graphiste et s'intéresse aux théories du complot (personne n'est parfait !) ; parmi ses divers projets, il tenait absolument à ce que je mentionne ses cartes pour Soldier Of Fortune 2, et voici donc Prisoner In Portmeirion et Zena on My Mind.

Giorgio Sommariva quitta Dynabyte et, après avoir travaillé brièvement avec la société italienne de logiciels WaywardXS, quitta le monde du jeu vidéo et travaille actuellement dans l'informatique.

Alessandro "Talexi" Taini, après sa période chez Ninja Theory, travaille maintenant sur une série Star Trek pour Nickelodeon.

Bruno Boz est heureux d'être à la retraite et pense encore de temps en temps à son passage chez Dynabyte.

Sources et références
  • Entretiens réalisés par moi-même via Skype, téléphone et courriels en 2020 et 2021 avec Massimo Magnasciutti, Marco Caprelli, Alberto Boz, Bruno Boz, Paolo Costabel, Giorgio Sommariva, Christian Cantamessa, Bjorn Giordano, Alessandro Taini, Dario Pelella et Simone Crosignani.
  • Magazines : The Games Machine n°73, K n°28, C+VG n°9 et 15, CU Amiga n°25.
  • Photo de Game.EXE fournie par Ilya Chentsov.
  • Un grand merci à toutes les personnes avec lesquelles je me suis entretenues, en particulier à Bjorn Giordano et Alessandro Taini pour les documents fournis pour The Killing Tool.
  • Un remerciement spécial à Bruno Boz pour avoir aimablement fourni un exemplaire original de Nippon Safes Inc.
Merci de votre lecture. Si vous souhaitez m'aider à poursuivre le projet, n'hésitez pas à consulter mon Patreon ou à m'offrir un café.


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