Joseph Charles d'Almeida (Paris 1822 - Paris 1880) par Franck d'Almeida né le 20 mars 1967 à Saint-Quentin, texte publié dans le Bulletin de l'Association Amicale des Anciens Élèves du Lycée Henri IV de Septembre 2021. Ancien élève mais aussi ancien professeur au lycée Henri IV, membre dès les tout premiers débuts de l'Association amicale des anciens élèves, dont il sera un temps président, Joseph Charles d'Almeida apparaît comme une personnalité originale, inventive, créative et douée d'un véritable talent pédagogique parmi le monde scientifique de son époque. Fils illégitime d'un diplomate portugais (il sera naturalisé en 1844), son père qui l'abandonna fut Manuel de Almeida né le 24 mars 1791, constitué prisonnier à bord du navire Suzanne et Marie sous l'Empire. Il commence ses études à la pension de Reusse, où il suit les cours du lycée Saint-Louis, avant de devenir élève du collège royal Henri IV. Tout en poursuivant les licences de mathématiques et de sciences physiques, il est préparateur pour M. Blanchet,  professeur de physique à Henri IV, de 1843 à 1848, année où il réussit le concours d'agrégation de physique. Il est alors un temps chargé d'enseigner cette science au lycée d'Alger, mais revient au lycée, redevenu lycée Napoléon, comme chargé de cours en 1852. Il y enseignera jusqu'en 1876. Cette même année 1852, introduit par son ami Marcelin Berthelot, qui est préparateur auprès d'Antoine - Jérôme Balard au Collège de France, il y prépare une thèse sur la décomposition électrolytique des sels dissous dans l'eau, qui lui vaut le grade de docteur-ès-sciences en 1856. La stéréoscopie inventée par Charles Wheatstone en 1838 connaît de nombreuses variantes mais seul le procédé utilisant un filtrage des couleurs, élaboré par l'allemand Vilhelm Rollmann en 1853 et plus tard appelé anaglyphe, permet d'imprimer en une seule image, qui peut être de grand format, l'information nécessaire à une vision en relief, que l'on obtient au moyen de lunettes filtrantes. Charles d'Almeida présente cette technique à l'Académie des sciences dès 1858 et s'intéresse à son perfectionnement. Ses recherches vont ouvrir la voie à la strobostéréoscopie, méthode applicable au cinéma et utilisant l'alternance de vues filtrées de deux couleurs complémentaires. C'est à partir de ces travaux que Louis Lumière produira le premier film en relief en 1936. La fatigue visuelle que cause le port des lunettes filtrantes et diverses distorsions optiques et chromatiques a néanmoins limité le développement de ce procédé. A son activité de chercheur, Charles d'Almeida joint une activité pédagogique intense qui se carctérise à la fois par la bienveillance attentive qu'il porte à ses élèves et par un souci de vulgarisation peu commun à cette époque. De ce point de vue, le Cours élémentaire de Physique, précédé de notions de Mécanique et suivi de problèmes (Paris, Dunod), qu'il rédige avec M. Dunod en 1862 et qui connaîtra trois rééditions revues et augmentées, est remarquable. Outre la volonté de donner un exposé concret de la physique en évitant les difficultés mathématiques, ce traité se distingue par deux affirmations que les manuels méconnaissent encore ou expriment mal : l'équivalence du travail et de la chaleur et l'identité du rayonnement thermique et de la lumière. C'est le besoin vital de rétablir des communications entre Paris et la province durant le siège de Paris de 1870 - 1871 qui suscite les deux réalisations les plus frappantes de Charles d'Almeida. Appelé par le Gouvernement de la Défense Nationale à faire partie de sa commission scientifique, il est orienté vers le rétablissement du télégraphe, dont toutes les lignes sont coupées. Sur une idée qui semble due à Jean Gustave Bourbouze, et en collaboration avec Quentin Paul Desains (né à Saint-Quentin le 12 juillet 1817), d'Almeida étudie ensuite une transmission utilisant l'eau de la Seine comme conducteur. Il dispose là d'une ligne tout installée et insoupçonnée des Prussiens. La difficulté est d'émettre avec une puissance suffisante et d'amplifier le signal, très affaibli, à la réception. Ce n'est qu'en décembre 1870 que d'Almeida  pourra s'exfiltrer par ballon, vers la Champagne d'abord, puis vers Lyon, ensuite Bordeaux, où l'appelle une mission secondaire, l'embouchure de la Seine et finalement Poissy, où il s'installe le 14 janvier 1871. Entretemps, il fait venir d'Angleterre le matériel nécessaire à monter un puissant émetteur, mais dès le mois de décembre la Seine a gelé. La réception doit se faire sur une barque à Paris dans des conditions qui ruinent la santé de Desains. Finalement, les essais ne seront concluants qu'à la veille de la levée du siège de Paris. Le principe de cette tentative est le même que celui des transmissions (télégraphiques ou téléphoniques) par le sol (TPS), avec un conducteur bien meilleur, mais sur une distance sensiblement plus longue. Inutilement difficile à mettre en oeuvre et en de paix, cette technique va sombrer dans un oubli presque total jusqu'à ce que le sous-lieutenant André Delavie en remette l'intérêt en évidence en 1915. Les écoutes par le sol et les transmissions par le sol vont jouer un rôle majeur jusqu'en 1918, sous l'égide du futur général Ferrié. En effet, le bouleversement incessant du terrain par l'artillerie peut troubler mais n'interrompt pas les TPS. Celles-ci restent très appréciées de nos jours en spéléologie et tout particulièrement pour les opérations de secours en milieu souterrain. D'Almeida s'intéresse aussi aux communications par voies aérienne. La poste par ballon a certes un grand succès, mais la fabrication et la mise en service d'un ballon sont des opérations longues et compliquées. De plus, les ballons, une fois en vol, sont à la merci des aléas météorologiques et des tirs ennemis. D'où l'intérêt du pigeon voyageur. Sa disponibilité et sa faible vulnérabilité - le fusil Dreyse n'est pas idéal pour la chasse aux pigeons - ont malheureusement pour contrepartie une très faible capacité d'emport. Charles d'Almeida voit dans la microphotographie la solution à cet inconvénient. Il s'associe pour cela avec le photographe René Dagron, qui non seulement va fournir et mettre au point le matériel photographique avec l'aide d'Albert Fernique (marié le 24 octobre 1865 à Saint-Quentin. Voir son mémoire imprimé à Saint-Quentin "Un Voyage en Ballon pendant le siège de Paris" novembre 1870) mais négocier avec l'administration des postes le service de "Poste photographique". D'Almeida, pour sa part, développera le déchiffrage et la diffusion des messages à réception. Les performances atteintes par cette technique sont spectaculaires : Dagron parvient à reproduire une page du Journal Officiel dans une surface de moins d'un millimètre carré et dès le 8 novembre 1870 un pigeon peut emporter un feuillet de 12 centimètres de côté qui porte, sous la forme de 200 points millimétriques, 10 000 dépêches de quelques lignes chacune. La projection de ces points sur grand écran, mise au point par d'Almeida, permet ensuite à une petite armée de copistes de diffuser les dépêches en autant d'exemplaires que nécessaire. On est déjà très près des taux de compression qu'atteindront les Allemands, dans un but stéganographique cette fois, dans l'entre-deux-guerres. Charles d'Almeida a été aussi, lors de cette guerre,  un des souscripteurs de canons répondant à l'appel de la Société chimique de Paris. Il est aussi membre de la Commune de Paris en 1871. Son travail scientifique durant le conflit lui vaut l'attribution par le ministère de la Guerre de la Légion d'honneur pour services rendus. En juillet 1871, Zénobe Gramme présente à l'Académie des sciences et brevète une génératrice à courant continu ou dynamo qui restera connue sous le nom de machine de Gramme. Menuisier devenu électricien, Gramme est un esprit empirique qui a bien conçu que la rotation d'un bobinage dans l'entrefer d'un aimant doit y générer un courant continu, mais n'a pas l'outillage physique et mathématique pour en développer la théorie. C'est d'Almeida qui la mettra au point en 1872. Dès 1872, il revient à ses activités d'enseignement et d'animation de la communauté scientifique. Dans les premières, il a toujours fait preuve d'un intérêt personnel pour chaque élève, même et peut - être plus encore pour les moins brillants, s'efforçant avant tout de communiquer l'amour de sa matière et son ardeur au travail. Il porte une attention toute particulière à la formation de jeunes professeurs, encourageant leur esprit d'innovation et les poussant à l'orienter vers des applications industrielles. Par ailleurs, déjà membre de la Société philomathique de Paris, dont il est président de 1865 à 1866, et membre fondateur de l'Association française pour l'avancement des sciences depuis 1864, il est un des fondateurs de la Société Française de Physique en 1873 pour avoir joué un rôle majeur (Cf. "Les 150 ans de la Société Française de Physique par l'historien Nicolas Nio à la page 9, Éditions EDP Sciences 30 juin 2023). Il en sera le premier secrétaire général, et cela, jusqu'à sa mort en 1880. Toujours soucieux de promouvoir une vulgarisation de haute qualité des dernières découvertes scientifiques, il crée en 1872 le Journal de physique théorique et appliquée, dont il resta le principal rédacteur et qui a rendu d'incontestables services. A l'intention des enseignants isolés, il crée aussi une bibliothèque tournante d'ouvrages spécifiques. La mesure de son prestige se révèle lorsqu'il est élu président de l'Association Amicale des Anciens Élèves : dans les jours qui suivent, celle-ci recueille une centaine de nouvelles adhésions. Aux côtés de membres aussi prestigieux qu'Elie de Beaumont, Ferdinand de Lesseps et Marcelin Berthelot, il déploie ici aussi un remarquable talent d'organisateur, portant une attention toute particulière au rôle social de l'Association et au soutien aux camarades en difficultés. Promu inspecteur général hors cadre de l'Instruction publique en 1879, et en cette même occasion officier de l'Instruction publique (ce qui serait de nos jours officier des Palmes académiques), il vient au lycée Henri IV présider la remise des prix le 5 août 1880. Il décède le 9 novembre de cette même année. Jouissant d'un rayonnement considérable dans le monde universitaire et scientifique de son époque, ami proche de Jules Ferry et de Marcelin Berthelot, en relation de travail avec Eugène Ducretet, Sainte-Claire Deville, Elie de Beaumont ou encore Quentin Paul Desains (Cf. rue des Frères Desains à Saint-Quentin), à l'occasion conseiller de Jules Verne (décédé le 24 mars 1905 à Amiens), Charles d'Almeida (Beau-Fils du mathématicien Charles Choquet né à Abbeville en 1790) est aussi un grand voyageur, qui rencontre les scientifiques de nombreux pays d'Europe et d'Outre-Atlantique. C'est ainsi qu'il assiste aux côtés de son ami Ferdinand de Lesseps à l'inauguration du canal de Suez et parcourt durant sept mois l'Amérique en pleine guerre de Sécession (1862). Il compte aussi des élèves non moins brillants : Édouard Desains (né le 28 juillet 1812 à Saint-Quentin, rue d'Isle), ce dernier fut enseignant au Lycée Henri IV et professeur d'Édouard Branly (domicilié à Saint-Quentin dès 1845), l'éminent mathématicien Émile Picard et le prix Nobel de physique Gabriel Lippmann, le physiologiste et médecin Nestor Gréhant (né à Laon le 2 avril 1838), disciple et successeur de Claude Bernard, Charles Bourseul, l'inventeur du téléphone, le botaniste et académicien Gaston Bonnier. Franck d'Almeida.  P.S : n'ayant pas de formation scientifique universitaire, je tiens à remercier Yves Serruys, trésorier de l'Association Amicale des Anciens Élèves du Lycée Henri IV. Mr Yves Serruys était un ingénieur diplômé de l'école Centrale, décédé le 15 octobre 2023. Ce grand Monsieur qui a validé mon article était Membre de la Commission de l'énergie Atomique (CEA), il est également Docteur ès sciences, auteur de "101e, en avant !" aux Éditions Pierre de Taillac : dissous en 1985, le 101e régiment d'infanterie nous invite à revivre sa glorieuse épopée. Année d'édition : 2021. En ce qui concerne le physicien Joseph Charles D'Almeida, il n'y a pas eu de messe dans l'une des églises du 16e mentionné dans un journal, l'archiviste n'a rien trouvé, on peut penser à l'hypothèse d'un suicide : ce qui explique que tous les discours des personnalités lors des obsèques de Mr D'Almeida se sont tenus devant sa sépulture, en 1880 l'église refusait de célébrer les obsèques des suicidés. Conclusion : on comprend mieux que le physicien français Joseph Charles D'Almeida soit tombé dans l'oubli à tel point que le corps du défunt reposant au Cimetière de Montparnasse a été transféré en l'an 2000 à l'ossuaire du Père Lachaise sans que le personnel sache qui était véritablement Joseph Charles D'Almeida... il allait avoir 58 ans...